La sélection de Donc Acte !

Donc Acte ! ne suit pas l'actualité cinéma à la loupe. Donc Acte !, qui s'est intitulé Le cinéphobe pendant une courte période, n'a pas pour passe-temps de visionner des pelloches de cinoche. Donc Acte ! ne va pas souvent voir une œuvre en salles. L'envie est rare. Le plaisir est d'autant plus intense lorsque je suis satisfait par une rencontre du 7ème art. Certains films m'inspirent des réflexions ; c'est ce que je souhaite partager. Je ne propose pas de thèses et il m'arrive de gâcher les histoires en racontant la fin. Vu que je ne mets pas ce qui a été fait de l'invention des frères Lumière sur un piédestal et que je suis des fois moqueur, Donc Acte ! peut ne pas plaire.

mercredi 31 août 2011

The Hospital

Mercredi 31 Août 2011
Jour

The Hospital, Arthur Hiller, 1971, USA

Le récit de The Hospital repose sur une inversion des rôles et de la mécanique usuels d'un établissement de santé publique. Les patients surveillent le corps médical, et, l'hôpital tue plutôt que guérir.

Cette comédie grinçante correspond à l'humour subversif et absurde en vogue à la fin des 1960's et durant les 1970's. M.A.S.H., Catch 22, Abattoir 5 / Slaughterhouse-Five, Slap Shot (presque toute la filmographie de George Roy Hill et de Robert Altman) ricanent des institutions, des représentants de l'autorité, des icônes publiques et religieuses, des objets de gloire, ... entre autres.

Dans The Hospital, le médecin chef de l'établissement de santé publique, le docteur Bock, incarné par George C. Scott, est alcoolique, dépressif et suicidaire. Il mène une enquête interne concernant des erreurs médicales accidentelles (tuant des patients bien portants considéré les soins apportés) et volontaires (prenant pour cible les responsables des erreurs médicales). Une femme incarnée par Diana Rigg fait une drague sans équivoque au docteur Bock fier de son impuissance. Les patients ne veulent plus être soignés à l'hôpital car ils se rendent compte de l'incompétence et de l'hécatombe du personnel. De plus, l'hôpital connaît des difficultés budgétaires. Il est l'objet d'une manifestation organisée par la communauté environnante qui veut revoir la gérance de ses propriétés. Les chirurgiens ne sont plus intéressés que par l'évasion fiscale. Les étudiants en médecine pratiquent des opérations réservées aux praticiens expérimentés.

Ce monde marchant à l'envers bénéficie d'une mise en scène sèche et efficace d'Arthur Hiller. L'accent est mis sur le jeu d'acteur (George C. Scott en premier lieu). Le rythme est rapide. Les séquences s'enchaînent sans ennui. Le verbocentrisme et la transparence sont respectés. Le symbolisme de The Hospital sert une critique en creux des réductions des dépenses de santé et de l'inversion des pôles d'autorité (identifiés comme causes des dysfonctionnements majeurs). La philosophie du laisser-passer l'orage est contre-balancée par la prise de responsabilité des ainés qui accueillent les nouveaux rebelles avec défiance. The Hospital est une perle du cinématographe.

Burnt Offerings

Mercredi 31 Août 2011
Jour

Burnt Offerings, Dan Curtis, 1976, USA

Il y a des jours comme cela. On lit des articles sur un blog sympa. Le thème est intéressant (hommage au T#5 achevé aujourd'hui sur le blog Il a osé !). On se remémore des séquences des films évoqués. On regrette que des longs-métrages que l'on aime bien ne soient pas représentés. On en dédaigne d'autres qui n'y ont pas leur place. On laisse quelques commentaires sujets à controverse et on s'en va comme un voleur dans la nuit. Puis, on se prend à vouloir participer autrement. On songe à revoir un vieux film de maison hantée, à rédiger un article et à l'envoyer par mail aux rédacteurs du blog concerné (même si l'heure limite est dépassée et que l'on ne vous a rien demandé). Mais la réalité est toute autre. Au vu du résultat de l'article, on préfère chier sur son propre paillasson.

Burnt Offerings semblait présenter quelque crédibilité grâce à la présence de Bette Davis et d'Oliver Reed au générique mais ce film de maison hantée est une merde infâme. Rien ne fonctionne. Tout est ridicule. Le récit s'attarde longuement sur une bâtisse qui dérange, sans être crédible, les raisons des habitants afin de se nourrir de leurs vies et de rester intacte.

Karen Black joue l'épouse sensible. Elle se laisse hypnotisée par une mélodie de boîte à musique. Elle sert des repas à une dame âgée qui n'existe pas. Tant de construction la fait basculer dans une folie meurtrière. Lors du final grotesque, elle change de coupe de cheveux, de couleur de cheveux, de couleur d'yeux, d'habits et de joailleries. Elle balance son mari par la lucarne.

Oliver Reed joue Oliver Reed en mode mari et père. Il le fait très bien jusqu'à ce qu'il se fasse jeter par une lucarne sans raison apparente par sa femme.

L'enfant meurt écrasé par la cheminée.

Bette Davis a probablement payé ses dus d'impôts et les traites de sa baraque.



La sélection du mercredi 31 Août 2011

Mercredi 31 Août 2011

Cette semaine est marquée du sceau du DVD. Pas question que j'aille en salles.


La bande-annonce de Blackthorn (2011) résume bien son intrigue de dernière chevauchée de Butch Cassidy qui rentre à la maison ou qui conseille à un crétin qui ne charge pas son pistolet en le défiant de retourner chez sa maman. Le souci réside dans la photographie du film. La lumière crue crée des zones de surexposition sur les visages des acteurs.

Les duellistes, vont-ils cramer au soleil ?



Destination Finale 5 (2011) reprend la formule des Destinations Finales 1, 2, 3 et 4. Dans la scène d'introduction, un ou une adolescent(e) va prévoir que tous ses ami(e)s et lui/elle compris vont mourir dans une catastrophe. Ils sont malins. Ils évitent le pire mais la mort n'aime pas qu'on lui pose un lapin. Elle réclame son dû. Elle ne peut être ni affrontée ni défaite. En général, tout le monde meurt avant le générique de fin faute de pouvoir l'éviter.

Fallait pas tourner dans un film où la mort est en colère.




R.I.F. (2011) est réalisé par Frank Mancuso, homme qui a commis un crime contre Jean Dujardin et les sujets tels que le viol d'enfant, le meurtre d'enfant, le deuil d'un enfant, la vengeance, l'erreur judiciaire, la quête de vérité et la manipulation d'un homme souffrant en mettant en scène Contre-enquête en 2006.

Pourquoi Yvan Attal crie-t-il en tirant au fusil ? Tue-t-il son fils ou sa femme ?, là est la question.






La bande-annonce de La guerre est déclarée (2010) m'inspire un drôle de résumé. Un couple a un problème difficile à surmonter. Leur premier né est atteint d'une maladie non présentée. Mais ils s'aiment, courent, se contemplent sur un balcon, descendent en synchrone d'un rebord de fenêtre et vont à la plage. Des proches sautent de joie. Le bébé a disparu de l'écran. Que lui est-il arrivé ?

En tout cas, ce film de guerre est une ode à la joie de vivre.




Cadavres à la pelle (2010) marque le retour de John Landis qui n'a rien réalisé de drôle au cinéma depuis 1988. Il veut faire rire avec des morts vendus à l'école de médecine par des comiques britanniques en forme scatologique.

Je suis certain que John Landis n'aurait jamais dû arrêter Dream On en 1992.






Werner Herzog possède la verve d'un homme ébloui par la beauté de ce monde. Sa passion des "ah..." et de la musicalité des grottes se transpose magnifiquement en interview. Considéré que le cinéaste allemand est le narrateur en voix-off de la bande-annonce, il officie probablement comme tel sur le film.

Je ne suis pas sûr de pouvoir de conserver mon sérieux envers ce moment historique de la captation "peut-être pour la dernière fois" de La grotte des rêves perdus (2010).




La bande-annonce de Neds (2010) montre des jeunes déscolarisés s'échauffer les esprits afin de se battre. Ils provoquent les adultes et l'autorité. Les parents vont finir par renvoyer le bâton et remporter la bataille. Je prévois des morts et un retour au calme.

Neds est le film que les intellos de gauche vont conseiller pour se rendre compte une fois de plus que la dénonciation de la violence sous-jacente du monde anglo-saxon patriarcal néo-libéral moderne post-moderne capitalistique pré-post-tatchérien pré-post-blairien pré-post-Hugh-Grant fait la grandeur d'un cinéma britannique social que l'on doit tous leur envier. Pour défendre la qualité de Neds, ils feront un détour par l'actualité des émeutes récentes en soulignant l’écœurante injustice sociale envers les minorités.


Les Winners (2011) est dans la lignée des Juno, Sunshine Cleaning, Dan in Real Life, Little Miss Sunshine, Lars and the Real Girl, Sunshine Juno, The Real Girl in Real Life, Lars and the Cleaning, Dan in Miss Sunshine et Sunshine Sunshine. Il a été nominé et a probablement tout remporté au festival de Sundance. C'est un film qui nous apprend ce qu'est la comédie, la vie, les tenues de gym et comment s'asseoir sur un canapé. Les personnages sont des loosers improbables mais ils vont gagner. Est-ce du cinéma indépendant ? On dirait Karaté Kid (un film de studio hollywoodien) version lutte gréco-romaine en moufles et pantoufles : Miyagi est incarné par Paul Giamatti et Ralph Macchio est toujours en taule dans My Cousin Vinny en 1992.

1992 était une bonne année durant laquelle ont été complétés Batman le défi, Impitoyable, L'armée des Ténèbres, Basic Instinct, Dracula de Coppola, Wayne's World, Maman, j'ai raté l'avion, Glengarry Glenross, Une équipe hors du commun, Bodyguard, Candyman, Mon cousin Vinny, L'arme fatale 3, Braindead, Reservoir Dogs, The Mighty Ducks, Et au milieu coule une rivière, Le dernier des Mohicans, Des hommes d'honneur, Le temps d'un week-end, Alien 3, Piège en haute mer, The Crying Game, Encino Man, Malcolm X, Les Experts, Horizons lointains, Jeux de Guerre, Twin Peaks - Fire Walk with Me, Universal Soldiers, La mort vous va si bien, J.F. partagerait appartement, Lunes de Fiel, Boomerang, Chaplin, El Mariachi, Jennifer 8, Des souris et des hommes, Buffy - tueuse de vampires, Beethoven et The Player. Malheureusement, 1992 fut la dernière année de collaboration de John Landis au TV show Dream On.

mardi 30 août 2011

Sunset Boulevard

Mardi 30 Août 2011
Analyse d'une séquence


Sunset Boulevard, Billy Wilder, 1950, USA.

Joe Gillis, un scénariste sans talent, fait une rencontre hasardeuse qui va bouleverser son existence. Norma Desmond, ancienne gloire du muet, vit recluse dans sa luxueuse villa à Los Angeles en compagnie de Max von Meyerling, son majordome, ancien metteur en scène et ex-mari. Desmond lui propose de travailler au scénario du film qui lui permettra de retrouver sa place à Hollywood. Gillis accepte, s'installe chez elle et devient son amant. Mais l'actrice vit dans un monde de fantasmes et d'illusions qui s'avère néfaste pour Gillis.

La séquence analysée se concentre sur la rencontre entre les deux personnages principaux du film : une star des années 1920, Norma Desmond, et un scénariste des années 1950, Joe Gillis. Elle débute à 11'40'' (la voix-off de Gillis décrit l'intérieur du garage) et finit à 19'40'' (le travelling montrant Gillis s'asseoir et la voix-off commentant son action).

Cette rencontre est narrée sur deux modes. La narration auditive adopte une vue rétrospective de Joe Gillis (incarné par William Holden) sur sa propre histoire alors que l'image montre le caractère direct de l'action. Ces deux vues s'opposent et se contredisent à quelques reprises. Billy Wilder utilise les capacités maximales des deux outils principaux du cinématographe (relatifs à ses deux périodes majeures) : l'image sert les intérêts d'une narration visuelle du métrage en hommage à la force d'une image sans son (propre au cinéma muet) et la voix-off sert la narration en hommage à l'avantage premier du cinéma parlant.

Billy Wilder utilise le son et l'image pour plonger le spectateur dans la subjectivité du personnage. Leurs utilisations ont-elles des buts différents ? Y a-t-il deux niveaux de lecture à Sunset Boulevard, l'un visuel et l'autre auditif ?


La subjectivité de Joe Gillis

La mise en image œuvre comme une narration factuelle. Elle est objective en focalisation zéro. Les plans suivent les mouvements de Joe Gillis. Les travellings comme les panoramas retranscrivent ses points de concentration et soulignent ses impressions (le travelling-avant sur le cadavre du singe). De nombreux passages d'une échelle de plan à une autre (dans le même plan) indiquent des changements évolutifs pour sa perception ; exemple : l'association des deux plans lors de son entrée dans la villa : le majordome surgit au premier plan d'un plan large pour dévoiler une partie du quiproquo suivi d'un plan moyen où Gillis s'arrête brusquement dans sa montée des escaliers (le plan s'élargit et le suit dans sa découverte des lieux).

Le procédé auditif est simple. Une musique extradiégétique souligne les émotions et la surprise de Gillis. Cette musique suit sa progression de l'extérieur à l'intérieur marquant un temps d'arrêt alors que Gillis se fige dans l'escalier. La musique plonge dans le flot émotionnel de Gillis.

Gillis est dominé par Desmond. Le cadrage et le point de vue servent la fascination qu'elle crée sur le scénariste. La première apparition visuelle de la star est signée d'un zoom insistant pour affirmer l'effort que doit faire Gillis pour la localiser. Le cadrage la favorise. Les échelles de plans sont inégalitaires : des gros-plans fixes de la star soulignent l'impression (tel que ses apparitions dans ses films muets) qu'elle produit sur Gillis. Dans le salon, ce schéma se répète. Le travelling-avant qui clôt la séquence marque la soumission du scénariste face à l'actrice. La mise en image de cette séquence est une construction vers ce plan.


La mise en image et la voix-off

La mise en  image et la narration des dialogues en voix-off affirment deux versions différentes de cette scène. L'image est le témoin d'un passé non commenté par Gillis. L'image donne une autre lecture du personnage que la voix-off retravaille (en minimisant les mauvais aspects et essayant de les attirer à son avantage). Le personnage principal est visiblement soumis à l'environnement (il est incapable de faire valoir la vérité face au majordome) alors que la voix-off fait entendre son détachement et de l'aisance face à la situation.

La voix-off de Joe Gillis est celle d'un mort. La narration sonore en focalisation interne est rétrospective. Or un individu revenant sur des faits peut les déformer, en omettre et décrire une version arrangée d'une histoire. Ainsi, lorsque Gillis obéit à l'ordre donné par Desmond de s'asseoir (dernier plan de la séquence), l’œil du spectateur le voit se soumettre par lâcheté (et besoin) mais son oreille l'entend fanfaronner et justifier ses motivations comme s'il contrôlait la situation. La voix-off de fin de séquence n'est pas en rapport avec l'image. Cette simple déformation des événements révèle le caractère cynique et manipulateur de Gillis plutôt que ses impressions.

Le son et l'image servent tous deux la subjectivité du personnage de deux manières différentes. L'image permet de souligner la subjectivité sur ce que Gillis choisit d'écarter alors que la voix-off sert une subjectivité de Gillis représentant la part de ce qu'il veut raconter. En créant ce décalage, Billy Wilder révèle les deux niveaux de lecture de son œuvre : l'honnêteté de sa mise en image et la malhonnêteté du récit du scénariste.


Deux angles au film ?

Non. Le son sert à comprendre la psychologie et le caractère de Joe Gillis alors que l'image représente les événements. Billy Wilder n'explique pas par deux méthodes différentes la même chose : il montre que le langage et le sentiment sont deux choses distinctes. Grâce au langage, Gillis peut mentir alors que l'image trahit sa version de l'histoire. Gillis est lâche (mauvais scénariste, sans emploi, fauché) et il se soumet à un système qui ressemble au système hollywoodien mais qui est dépassé (le scénariste n'est qu'un nègre pour les stars de l'écran et le réalisateur est un majordome). Billy Wilder utilise la voix-off pour souligner que Gillis se ment à lui-même et essaie d'impressionner le spectateur afin de redorer son blason. Billy Wilder raconte en images la version dédramatisée (minimisation propre à la légèreté d'esprit du scénariste) que Gillis cache. La voix-off éclaire la psychologie du personnage principal. La mise en image est autant construite pour éclairer le spectateur sur les sentiments de Gillis que pour le prendre dans sa narration.


Intérêt de l'analyse

L'intérêt de cette étude a été de mettre en évidence une manière différente de concevoir les relations entre le son et l'image. Pour traiter ce problème, il a fallu séparer la subjectivité mise en évidence par la voix-off et la subjectivité suggérée par la mise en image (et traiter leurs intentions).

Abattoir 5 / Slaughterhouse-Five

Lundi 29 Août 2011
Soir


J'ai récemment ressorti de mes archives personnelles un groupe de dossiers que j'avais travaillé pour l'école de cinéma (Paris I). Le texte ci-dessous est le rendu que j'ai écrit pour le cours Narratologie. Attention, le vocabulaire est technique.



Fiche d’analyse narratologique


Abattoir 5 (Slaughterhouse-Five), George Roy Hill, 1972, prix spécial du jury Cannes 1972, scénario de Stephen Geller d’après un roman de Kurt Vonnegut, Jr  Slaughterhouse-Five Or the Children’s Crusade écrit en 1969, avec Michael Sacks (Billy Pilgrim), Ron Leibman (Paul Lazzaro), Valérie Perrine (Montana Wildhack), Eugene Roche (Derby), Sharon Gans (Valencia)



Abattoir 5 montre le père de Billy Pilgrim (protagoniste principal) le jeter dans une piscine pour lui apprendre à nager. Billy se laisse couler. Pilgrim est constamment brutalisé et réagit passivement. Pilgrim est un innocent jeté en pâture dans un mode sans pitié aux cruels relents. Naïf incorporé à la guerre, il assiste au bombardement criminel de Dresde. Après la guerre, il fait un mariage de fortune avec une femme stupide et grasse d’ignorance. Ils "élèvent" un jeune fils qui enfreint la loi et une fille qui reproduit le modèle maternel. Pilgrim est enlevé par des extra-terrestres pour être un objet d’observation. Il se laisse déposséder de son temps en compagnie de la playmate de ses fantasmes. Il meurt assassiné par un lunatique. Il accomplit toutes ces choses en voyageant continuellement dans le temps sans avoir aucun contrôle.

Abattoir 5 est l’adaptation déclarée d’un best-seller américain de la fin des années 1960. La transcription est celle d’une œuvre de fiction unique et la narrativisation du film est une assimilation de la structure du récit original romanesque. Une réorganisation pour couper la durée filmologique du roman a été opéré mais aucun changement d’époques ou de lieux n’est à noter.

La structure du film (comme celle du roman) organise le récit biographique d’un homme en mélangeant passé, présent et avenir. Elle fait des connections directes entre ces moments en présentant Billy Pilgrim comme un protagoniste candide qui perd le fil de la linéarité temporelle. Le présent est succédé par le passé comme le futur précède ce dernier. Cet enchevêtrement des instants constitue pour la totalité du métrage sa structure discursive et son dispositif narratif.

Les temps


De l’enfance à la mort de Billy Pilgrim, 6 temps sont représentés dans ce film dont l’un est inconnu (T6) :

T1 : L’enfance de Billy.
T2 : Billy soldat à la seconde guerre mondiale
T3 : Vie sociale et conjugale de Billy à l’après-guerre
T4 : Présent de narration (Billy tape à la machine)(1ère séquence)
T5 : La mort de Billy (son futur)
T6 : Temps indéterminé sur Tralfamadore, planète extra-terrestre.

L’ordre


L’ordre dans lequel sont donnés ces temps dans le récit est le suivant :
T4, T2, T4, T6, T4, T2, T6, T2 et T3 en alternance pendant 15 minutes, T1, T2 et T3 en alternance pendant 57 minutes, T6, T2, T6, T2, T6, T4, T5, T2, T6.

L’ordre est déchronologique. L’ordre de l’apparition des événements est différent de l’ordre de l’apparition de ces événements dans l’histoire. Il y a discordance. Le film n’est pas linéaire. Le récit est et rétrospectif et anticipatif.

Abattoir 5 commence par un temps qui semble être celui de l’énonciation (T4). Pilgrim tape une lettre sur une machine à écrire. La voix off énonce le contenu de l’écrit pour souligner qu’il voyage dans le temps selon une logique qu’il ne maîtrise pas. Plusieurs flash-back s'enchaînent pour revenir au temps T4 vers la fin du film. Abattoir 5 pourrait être construit autour d’un flash-back complétif raccordant externe continu (il y a retour raccordant sur T4) mais il ne se conclue pas par ce temps. T5, T2 et T6 apportent ensuite d’autres éléments qui jettent le doute sur l’élément énonciateur du film. Pilgrim raconte sa mort (T5) en T4. Puis, en mourant, il retourne à la guerre (T2), d’où il se transporte sur Tralfamadore (T6). Sur Tralfamadore, il y est avant et après sa mort, montrant ainsi que même la mort n’en est pas une. Il continue de voyager dans le temps comme s’il n’était pas décédé. Le temps tralfamadorien est le temps de l’éternité. Cela rejoint la théorie d’Einstein selon laquelle le seul moyen pour l’homme d’atteindre l’état d’éternel se fait par le biais du voyage temporel. Abattoir 5 s’achève sur ce temps (T6) : le temps de l’éternel.

Considéré qu'Abattoir 5 jette le doute sur l’ordonnancement des moments dans ce qu’il a de plus basique (1. Billy voyage dans le temps allant notamment de futur à passé. 2. Billy vit encore après sa mort), le temps d’énonciation du récit est aussi incertain que le prochain point de chute de Pilgrim. Pilgrim vit éternellement. Qu'il soit perdu dans ses fantasmes ou qu'il possède le secret du voyage spatio-temporel, il n’y a pas de moment présent d’autre que celui que vit Pilgrim. Donc, le temps d’énonciation du film est relatif à Billy Pilgrim et son présent (tous les instants sont alors au présent).

Bien que le film commence par T4 montrant Pilgrim écrire une lettre, le temps d’énonciation n'est pas celui de la rédaction. George Roy Hill joue avec son spectateur et le trompe. Il utilise un code de narration connu pour installer un temps d’énonciation fictif. Et, suite à la révélation d’une falsification de son procédé, il appuie son propos sur la disparition des repères établis qui sont propres à ce récit cinématographique. En brisant les frontières des séparations habituelles et de la continuité logique entre les trois temps (passé puis présent puis avenir), Abattoir 5 œuvre à la construction d’un système de lecture qui permet des connections censées entre les événements de la vie d’un homme sans parcelliser ni limiter l’influence d’un temps au moment de son existence. Autrement dit, comment la vie d’un homme s’imbrique au-delà de l’ordonnancement connu des temps, tel un système s’auto-identifiant et s’auto-influençant.

Abattoir 5 est basé sur un système de montage alternant n’exprimant pas la simultanéité des actions mais la simultanéité des instants. T2 est monté en alternance avec T3 sur près d’une heure et 10 minutes du film. Les actions sont des raccords entre ces moments (exemple : Billy meurt allongé sur le sol de Philadelphie, un fondu enchaîné raccorde ceci à Billy allongé sur le sol de Dresde). L’amplitude de ce montage alterné s’étend sur toute la durée du film. Elle permet à Roy Hill de mettre en pratique deux types de flashs-back : rétrospectif et anticipatif : des flashs-back rétrospectifs (T1, T2, T3) et un flash-forward (T5).

Chaque temps en influence un autre ; le futur influence le passé et le présent, le présent influence le passé, le passé influence un autre passé (il y a monstration de relations entre les passés). Tous les temps sont des concepts indissociables et continuellement en système d’influence. T2 est en constante relation avec tous les autres T. T4 avec T2, T3, T6 et T5, Etcetera ... Le futur (T5) appartient au passé-temps de la biographie (T4). Il est raconté comme s’il était déjà arrivé (fin du film : T4) et appartient à un passé qui existera demain (fin du film : retour à T2). Le futur est convié dans le récit sans conclure Abattoir 5. Il s’immisce dans le présent alors que celui-ci est déjà un passé (le futur étant lui-même déjà arrivé).

Abattoir 5 ne présente pas de conception du futur comme futur. Le passé peut encore arriver par la suite. Il n’y a pas non plus de passé. Il en est donc de même pour le présent. Le film se fonde sur une structure qui utilise le flash-back et le flash-forward selon une caractérisation dite normale et continue du temps mais échappe à ces définitions en acceptant la logique d'Abattoir 5. Il ne peut y avoir ni de flash-back ni de flash-forward considéré qu’aucun temps n’en précède un autre ou n’en suit. Comment un flash-back peut-il être un flash-back si le passé arrive après le futur et le présent, et, un flash-forward un flash-forward si le futur arrive avant le passé et le présent ? L’élément d’enchaînement des temps concluant Abattoir 5 jette le trouble. Le flash-forward (T5) est lui-même un flash-back (dans le temps T4, Billy raconte sa mort comme déjà arrivée et Roy Hill la montre tel quel).

L’œuvre de Roy Hill se pose comme conceptrice d’un type de structure temporelle relative au personnage de Pilgrim pour le récit. La déconstruction de la chaîne causale "normale" révèle une philosophie de la conception d'événements atemporels et de la narration propre à la psychologie du protagoniste principal. Tous ces temps appartiennent à un seul et unique temps : un éternel et chaotique enchevêtrement des temps (Victor Hugo parlait en son temps de l’histoire comme d’une « partouze des siècles »). Le mélange opéré par George Roy Hill et par Kurt Vonnegut, Jr (dans le roman) inclue une philosophie de la perte de repères. Les termes (flash-back, flash-forward) sont exploitables dans la logique de démonstration à laquelle veut amener Roy Hill mais ils demeurent impuissants face à une utilisation normale de leurs causes et de leurs effets. Les temps n’étant plus ce qu’ils sont dans l’éternité du protagoniste, les ressorts classiques de signification des termes d’analyse ne sont que des semblants d’eux-mêmes. On parle alors de semblant de flash-back et de semblant de flash-forward.

La vitesse


Le rapport entre le temps du récit (durée du film) et le temps de l’histoire (durée globale) montre l’infériorité du premier sur le second. Abattoir 5 énonce des épisodes de la vie de Pilgrim sur 104 minutes. Et la vie de Pilgrim dépasse 104 minutes.

Le temps global de l’histoire est par contre difficile à déterminer. Comme on l’a vu précédemment, Pilgrim semble tendre à l’éternité de par la possibilité de voyager dans le temps. De plus, aucune scène n’est entière. Toutes sont coupées en des points soigneusement étudiés. Elles sont raccordées par des gestes, des mouvements, des éléments picturaux similaires. Les raccords se font généralement par le son. Le son d’ambiance disparaît et laisse place au son correspondant à l’élément du temps qui va suivre. Ces raccords se font selon deux vitesses différentes de défilement des alternances.

D’une part, les coupes normales entre des morceaux de scènes plus ou moins longs (les plus courts sont de 1 seconde ; voir la seconde vitesse, les plus longues vont jusqu’à 6 minutes) sont enchaînées en alternance. Elles permettent de raccorder des éléments de vie de Pilgrim qui se rejoignent par leurs similarités. Elles signifient des enchaînements d’action de deux temps différents allouant ainsi au spectateur d’éviter des moments inintéressants. Par exemple, lorsque Pilgrim s’endort dans le train qui l’emmène au camp de prisonnier, pour éviter de montrer Billy entrain de dormir, George Roy Hill insère une scène le montrant se cachant sous sa couverture d’hôpital à son retour de la guerre.

D’autre part, des plans courts (pas plus de quelques secondes chacun) sont montés rapidement. Les deux temps qui sont utilisés à cet escient sont T2 et T3. Ces moments de relation intenses entre eux correspondent à des passages discursifs sur des événements éloignés dans le temps mais proches dans la signification. Elles permettent un rapprochement critique des deux éléments mis en relation. A la fois de la guerre et de l’après-guerre.

Ainsi les nominations du professeur et de Pilgrim, montées en alternance de façon rapide, prennent des caractères particuliers et différents. Les deux contextes renvoyés l’un à l’autre, par leurs similarités, ajoutent à la nomination du professeur en tant que représentant des prisonniers dans un camp nazi le caractère social indéniable de l’activité qu’il accepte d’opérer alors que le cadre de cette action est celui où la mort marque l'ensemble de son empreinte. Tandis que la nomination de Pilgrim à un poste de chef de club privé pour riches industriels prend un caractère d’institution douteuse et déplacée vis-à-vis des dangers de la condition en tant de guerre pour l’autre élu ; elle est hypocrite et insignifiante. Cette mise en relation critique autant l’American Way of Life que la guerre dans ce qu’elle a d’institutionnel.

La fréquence

La fréquence est singulative. Il n’y a pas de répétition d’actions dans le film. Il y a juste retour à des temps connus importants en soi : T2 et T3 surtout.  De la 10ème minute à 1h23 du film, il y a une alternance continue entre ces deux temps. Une exception est notable : à la 25ème minute, T1 montre un morceau très court de l’enfance de Billy (40 secondes).

Le plus important des temps est T2, celui montrant Pilgrim à la guerre. Ce film s’attarde dans sa moitié sur cette époque. Ces 52 minutes (en opposition aux 33 minutes environ occupées par T3) servent de support au discours critique sous-jacent de l’American Way of Life propre aux fins des années 1960 (auquel renvoie le va et vient constant entre T2 et T3) et à celui qui s’élève contre la minimalisation du bombardement de Dresde par les alliés (considéré comme un crime de guerre commis par les alliés).

Les trois séquences précédant le bombardement comportent les seules indications temporelles du film. La date (13 / 02 / 1945) est marquée à l’écran une fois (la première fois) et l’heure est indiquée par trois fois (3pm, 5pm et 9.55pm). L’effet dramatique du bombardement de Dresde est renforcé d’autant qu’à l’image sont montrés des enfants, des personnes civiles faisant la fête et la vie quotidienne de la ville. Ceci est monté en alternance avec un patient d’hôpital arguant que le bombardement de Dresde est une exagération des erreurs des alliés dans cette guerre vis-à-vis de ce que les nazis ont commis.

Le discours apparu en T3 est ici donc discrédité par la réalité de T2 montrée par Roy Hill et la mise en relation de ces deux réalités de deux temps différents.

La régulation de l’information


Abattoir 5 est basé sur un enchâssement des souvenirs (l’existence de Pilgrim n'a aucune surprise pour lui : il est omniscient). Les signes sont au préalable connaissables. Entre eux, ils sont généralement coupés dans leurs sons ambiants pour être raccordés par le son de la scène qui suit (par exemple : lorsque Pilgrim tape à la machine, le bruit des touches est remplacé par celui des chars allemands avant que l’image de ces chars n’apparaissent), ou, par des fondus enchaînés plus rares mais tout aussi signifiants. Le spectateur sait vers quel temps il se dirige mais il ignore à quels événements il va assister.


Le fondu enchaîné prend son importance vers la fin du film, donnant à croire que le personnage ne meurt pas. Le fondu le fait passer de Philadelphie à Dresde à Tralfamadore. Il montre Pilgrim continuant à vivre après avoir été tué. La révélation se fait à ces tous derniers moments. L’utilisation du procédé de boucle parfaite (flash-back continu raccordant externe complétif) est inséré pour tromper la conception normale de ce type de narration et George Roy Hill appuie son propos d’éternelle confusion des temps par le fait d’amener d’autres temps après la mort (le passé et le temps Tralfamadorien).

La focalisation se fait sur le protagoniste principal : Pilgrim est en quasi-intégralité à l’écran (sauf à l’accident de voiture de sa femme). George Roy Hill plonge le spectateur dans le suivi du personnage qui voyage dans le temps pour soutenir l’intensité du récit. La focalisation est externe. On ne sait pas du tout du personnage. Par exemple, ses pensées ne sont pas données au spectateur.

Ce dernier en sait moins que Pilgrim sur lui-même. Le spectateur n’apprend qu’à la fin que Pilgrim voyage dans le futur (jusque là, il se remémore ce qui est nommé SON passé) et qu’il ne peut mourir. Ce décalage provoque une révélation surprenante sur la fin d'Abattoir 5. Le spectateur croit voir l’histoire d’un homme qui raconte sa vie au passé et découvre que cet homme, pour qui le passé n’est déjà plus qu’un concept comme sa mort, vit sans peur et à de multiples reprises.

La transmission des discours


Le discours écrit est utilisé pour servir une narration à partir d’une lettre que le protagoniste principal tape à la machine. Il est introductif et explicatif. Pilgrim rédige dès le début qu’il voyage dans le temps (sans laisser le plaisir de la découverte au spectateur) mais ce discours présente ; il ne relève pas le voile sur l’intégralité de la situation du voyage dans le temps. Le spectateur ne sait pas encore que le voyage temporel est une boucle éternelle dans laquelle même la mort se vit plusieurs fois.

Il est notable de souligner qu’un discours accousmatique (sans cause du son à l’image) prend place dans ce métrage. En effet, la voix des extra-terrestres sur Tralfamadore n’est qu’off sans aucune cause imagée. Ce qui renforce et la portée théiste (omnisciente et omnipotente) des extra-terrestres et la possibilité de la fantasmagorie de Billy d'imaginer un univers où il est choyé éternellement en compagnie de la femme de ses rêves par un public soumis à sa cause.

Conclusion


La multiplicité des temps et l’ordre déchronologique offrent à la structure du film le loisir de jouer avec les repères temporels connus en vue de les déconstruire (ceci au profit d’un discours métaphysique qui affirme la chaotique dans laquelle elle installe sa conception). Ils donnent un sens qui permet de poser les outils de narration (le flash-back et le flash-forward) comme des outils travaillant à leur propre remise en question quant à leur nature.

La vitesse d’alternance entre les temps est rapide. Elle s’applique selon deux modes. Les morceaux de scènes alternés (permettant de mettre en parallèle deux événements semblables) et les plans montés en alternance (mise en relation de deux actions proches dans leurs contenants et significations).

La fréquence du film est singulative. Il n’y a pas de répétition d’actions mais des allées et venues sur des moments dont l’importance de l’alternance de T2 et T3 est au centre de l’histoire pour souligner une critique de la guerre et de l’American Way of Life.

La régulation de l’info se fait par une focalisation externe sur le protagoniste principal Billy Pilgrim. Il y a infériorité cognitive. Le spectateur en sait moins que lui sur les événements qui jalonne sa vie. Ainsi les révélations finales sur la nature de ses voyages sont surprenantes.

La transmission du discours se fait par l’écrit (au début) et on relève un discours accousmatique rare lors des passages sur Tralfamadore qui appuie les deux interprétations majeures du film : le voyage dans le temps sur un mode passif, et, l'introspection de Pilgrim.









Les durées


T2 : Celui que Pilgrim fait à la guerre est le passage central du film (52 minutes sur la durée totale de 104). Il énonce sa rencontre avec Lazzaro (le personnage qui, à la fin de sa vie, assassinera Pilgrim), son arrestation et son emprisonnement par les nazis, sa rencontre avec Derby (un professeur, homme au cœur profond et tendre), son transfert à Dresde et le bombardement de cette dernière.

T3 : L’après-guerre (33 minutes 19 secondes).

T4 : Le temps de narration ? (5 minutes 12 secondes)

T5 : La mort (1 minute 38).

T6 : Tralfamadore (11 minutes 2 secondes)





L'ordre des temps


T4 : Le vieux Billy écrit pour dire qu’il n’a aucun contrôle sur ses voyages temporels. Son de char et de guerre. Il lève la tête.

T2 : 2.45 : Images de char et d’un paysage enneigé. Soldats nazis. Langue allemande. Regard du jeune Billy.

T4 : 5.58 : retour à la machine à écrire. Planète Tralfamadore avec la playmate. Ce matin en l’an x. Regard face.

T6 : Elle. 6.07 à 6.22. rappel à Tralfamadore doux.

T4 : 6.22 : retour à machine. Et en même temps, il était derrière les lignes ennemies nazies.

T2 : 6.42 : Rencontre avec Lazzaro. Rappels à guerre brusque et violent. Son.

T6 : 9.32. retour sur Tralfamadore, son raccord. Pas de passage par la machine. Le spectateur a compris. Il est lâché dans la nature. Parle de sa perdition (dans ses pensées ?) ; il était à la guerre.

T2 : 10.05. retour à la guerre. Transition sonore. D’un trip à un autre. « un petit baiser ». Premier conflit personnel avec Lazzaro à cause de son trip dans le futur (influence du futur sur le passé). Arrestation.

T3 : 10.33 : nuit de noces. 1ère fois de guerre à après-guerre.

T2 : 12.22 : retour à guerre. Son.

T3 : 14.23 : transition guerre à après-guerre. Appareil photo. Son. Seconde fois.

T2 : 14.31 : retour à guerre.

T3 : 14.37 à 38 : retour à après-guerre.

T2 : 14.38 : guerre. Transition discursive.

T3 : 14.40 : bis

T2 : 14.45 : bis.

T3 : 17.14 : après-guerre de Pilgrim à l’hôpital. Avant nuit de noces. Après-guerre : non respecté dans temporalité.

T2 : 18.35 : raccord geste entre mère et soldat Weary. Retour à la guerre.

T3 : 20.17 : retour à hôpital.

T2 : 20.58 : retour guerre. Son raccord (électrochoc / train sifflet au camp). Fin : dans douche.

T1 : 25.14 : jeunesse de Billy (avec père) : sous douche puis jeté dans la piscine par son père.

T2 : 25.54 : retour à guerre. S’écroule de fatigue.

T3 : 29.19 : retour après-guerre. Après mariage. Allongé dans herbe. Femme enceinte. Apparition de l’étoile.

T2 : 33.24 : retour guerre. Rencontre avec prof.

T3 : 38.09 : retour après-guerre. Raccord objet. Bague de diamant. Billy  âgé.

T2 : 40.26 : retour à guerre. Nomination du professeur.

T3 : 41.57 : retour à après-guerre. Nomination de Billy.

T2 : 42.07 : retour à nomination du professeur.

T3 : 42.12 : retour à nomination après-guerre.

T2 : 42.14 : nomination professeur.

T3 : 42.15 : nomination Billy

T2 : 42.18 : prof

T3 : 42.19 : Billy

T2 : 42.20 : prof

T3 : 42.21 : Billy

T2 : 42.48 : prof. Raccord discours.

T3 : 43.27 : retour après-guerre. Cinéma. Rapport à playmate. Sensualité.

T2 : 44.27 : retour à guerre. Transfert à Dresde en train.

T3 : 45.23 : retour à après-guerre. Relation au fils.

T2 : 46.29 : retour dans train. Et entrée à Dresde.

T3 : 52.23 : retour à après-guerre. Raccord parade / défilé. Prémonition dans l’avion. Hallucinations.

T2 : 55.22 : Dresde. Abattoir 5.

T3 : 56.22 : Billy presque mort dans neige après accident avion. Après-guerre. Sauvetage.

T3 : 57.11 : après-guerre. Accident de voiture de son épouse.

T3 (antérieur au précédent) : 59.31 : scène de la vie conjugale : épouse encore en vie. Cadeau de la cadillac dans laquelle elle meurt.

T3 : 1.01.18 : retour à accident de voiture.

T2 : 1.01.51 : Dresde. Entrée dans abattoir.

T2 et T3 alternant. Raccord son sur séquence alternée (montage alterné non de deux actions simultanés mais de deux temps différents montrant deux choses –événements, objets, personnages, sons, actions, critiques- en rapport utilisé tout au long du film.)

De 1.02.08 : radiographie. Après-guerre. Opération.

A 1.04.18 : opération.

T2 : 1.04.24 : Dresde

T3 : 1.04.34 : fondu enchaîné couloir d'abattoir, couloir d’hôpital. Hôpital. Mort de l'épouse. Réveil et confrontation avec écrivain minimisant bombardement de Dresde.

T2 : 1.07.54 : Dresde. 13 / 02 / 1945, 3 pm ; date et heure indiquées en bas d’écran. Une première. Vie ordinaire. Population.

T3 : 1.09.14 : retour dans chambre d’hôpital. Minimisation du bombardement.

T2 : 1.09.37 : Dresde. Vie ordinaire. 5 pm.

T3 : 1.09.57 : hôpital.

T2 : 1.10.00 : Dresde : enfants et personnes âgées. Carnaval. Masques d’animaux. Vie des soldats. 9 .55 pm. Bombardement.

T3 : 1.14.20 : retour après-guerre. De l’hôpital raccompagné par sa fille à la maison.

T2 : 1.16.00 : après bombardement.

T3 et T2 : Alterné avec rentrée de Billy chez lui

T2 : 1.17.30 : sortie de l’abattoir.

T3 : 1.19.54 : fils qui s’engage dans l’armée. Billy est emporté par l’étoile.

T6 : 1.23.38 : arrivée dans le futur. Tralfamadore.

T2 : 1.25.10 : Dresde. Ramassis des corps. Et autodafé.

T6 : 1.27.35 : Tralfamadore. Arrivée de la playmate Wildhack. Billy âgé et veuf.

T2 : 1.33.20 : Dresde. Mort du prof.

T6 : 1.34.38 : Tralfamadore : vie sans début, milieu ni fin.

T4 : 1.36.45 : retour à scène du début. Fille et gendre. Lettre écrite. Raconte sa mort.

T5 : 1.38.14 : monstration de l’assassinat par Lazzaro.

T2 : 1.39.52 : guerre. Coincé sous une horloge.

T6 : 1.41.20 : Tralfamadore : bébé sur la planète. Feu d’artifice.

1.42.34 : générique.

lundi 29 août 2011

The Thing 1982

Lundi 29 Août 2011
Ce dossier a été effectué dans le cadre du cours Le Son au cinéma et propose une analyse de la bande sonore de The Thing, John Carpenter, 1982.



The Thing, John Carpenter, 1982, USA

The Thing de John Carpenter est une adaptation d’une nouvelle de John W. Campbell Jr. déjà retranscrite à l’écran en 1951 par Howard Hawks et attribuée à Christian Niby. The Thing a été fabriqué dans le respect des règles de l’industrie cinématographique hollywoodienne. C'est un produit du studio Universal où le verbocentrisme est de rigueur et où aucune incongruité expérimentale ne vient perturber le spectateur du confort de son siège.

De Thomas Causey, producteur des effets sonores, à Ennio Morricone, responsable de la bande musicale, tous ont consacré des soins attentionnés à la confection de ce bijou du cinéma d’horreur. La conception des effets sonores a eu essentiellement lieu en post production. Thomas Causey a délégué trois ré-enregistreurs de sons (Bill Varney, Steve Maslow et Gregg Landaker) pour permettre à l’équipe de tournage une plus grande liberté d’installation et d’opération, et, pour créer un univers sonore au film (grâce à la création des effets propres à la chose). Deux monteurs sons sont attachés à la réalisation de la bande : David Lewis Yewdall et Colin C. Mouat.

Analyse de la bande sonore

Dans The Thing, le principe d’ancrage est respecté. Le son filmique est établi dans sa causalité avec la source suggérée. Cela renforce la tridimensionnalité et la construction de la diégèse*.


Le point d’ancrage est lui aussi respecté. La propagation du son est fonction de la position de la caméra. Le verbocentrisme, l’insertion de bruits censés être entendus dans une situation semblable, est partie de la construction de The Thing.


Les bruitages servent la réalité du métrage (en opposition au réalisme). Le premier bruit est celui d’un ovni dans l’espace (là où il n’y a aucun son) qui s’approche du lointain pour passer par dessus la caméra. Coupure montage. Le plan suivant voit la soucoupe s’éloignant du cadre et entrer dans l’atmosphère terrestre en fond de plan. Le son fait montre de cette évolution spatiale. Sur le premier plan, le bruit de l’ovni va en s’augmentant (suivant donc la progression de la soucoupe vers le spectateur). Ensuite s’inverse les donnes visuelles et sonores (le son s’évanouit en même temps que la soucoupe disparaît).

Intervient le titre du film qui déchire l’espace de l’écran, comme la soucoupe l’atmosphère, pour faire passer selon le système du pochoir de la lumière pour former les lettres du titre : The Thing. Le son du déchirement est représenté en raccord avec l’image.



Selon les lois cinématographiques, la déchirure d’un titre n’appartient pas à la diégèse d’un film. Dans The Thing, elle appartient à la surface écranique. L'équipe son crée une impression de vérité envers ce qui apparait à l’écran. Ce dernier se déchire visuellement (la lumière peut être considérée comme étant celle du projecteur de la salle). Le son sert à renforcer la croyance en ce que voit le spectateur. Avec The Thing, la logique de création de l'univers diégétique suit la logique du verbocentrisme et de l’intronisation du spectateur dans cette diégèse. Le son crée le rapport entre le son et l’image afin de créer l'impression de réalité.

La typologie des ancrages


L’ancrage dans la diégèse concerne le monde visible. Les sons du film sont essentiellement synchrones (in) et faciles à identifier : des bruits de porte, d’hélicoptères, des coups de feu, de fermetures éclairs, de destructions de vitres, de matériels en métal, des aboiements de chien, les cris de la chose, etc … La synchronisation image-son sert à créer un effet de causalité renforçant la réalité de l’univers fictif.


Sont également utilisés des sons synchrones hors-champs (tel l’allumage des lance-flammes ou certains dialogues). Ils permettent une économie de détails ; une fois la synchronisation faite, nul besoin de la répéter. La réalisation se concentre sur le déroulement de la narration et sur l’émotion.


John Carpenter s’amuse avec ce procédé de synchronisation. A chaque fois que le nom de la chose est prononcé par McReady (incarné par Kurt Russell), le personnage infecté est montré à l’écran. John Carpenter sème des indices trop évidents pour être crédibles et s'amuse du scepticisme du spectateur.


L'équipe son de The Thing crée une impression de réalisme, grâce à des sons qui n’ont pas forcément de relais de vécu pour le spectateur (les coups de feu, le bruit des lance-flammes, le vol de l'ovni, les cris de la chose). Ces derniers sont créés artificiellement. Ils s’opposent en terme de langage à celui des hommes. La chose crie alors que les hommes parlent. Ce qui crée une incommunicabilité entre les espèces mais aussi une reconnaissance distincte de la nature de ce que l’on voit. Si la chose n’est pas découverte visuellement, elle peut s’identifier à l'ouïe. Ainsi, le premier humain infecté de la base américaine révèle cette affliction par ce moyen.



Le souffle du vent et le silence à l’intérieur de la base participent à la narration. Une musique diégétique ("Superstition" de Stevie Wonder) et le bruit des sirènes d’alarme créent un lien entre les pièces de l’espace intérieur de la base. La musique émise par un poste de radio établit une topologie des lieux en fonction de sa volumétrie sonore perçue dans telle pièce et dans tel couloir. La sirène d’alarme et les cris des loups provenant du chenil localisent les endroits de détente, utilitaires (cuisine, infirmerie) et d’habitations.

Le silence et le souffle du vent aident à la création d’une diégèse solide. Le milieu polaire où se déroule l’histoire est située dans un endroit quasi-désertique (trois présences notables : deux stations norvégiennes et américaines et le site du crash de l'ovni) coupé des populations sédentaires. Les seuls éléments ambiants existants sont le silence de certains intérieurs de la base et le souffle du vent polaire qui domine en extérieur. Ce dernier se fait entendre lorsqu’il bouscule les murs et toits de l’édifice et que la caméra se trouve dans une pièce susceptible d’en souffrir.


Ce silence et ce vent font partie des ressorts à tension du film. Certaines scènes en présence de la chose se déroule sans appui musical laissant donc toute l’horreur des cris de la bête envahir l’espace auditif en même temps que le monstre envahit l’espace visuel de l’écran. Point d’effets trop appuyés n'ont besoin d’être pour intensifier un moment dramatique. Il en est ainsi de la scène de réanimation de l’un d’eux qui se révèle être infecté alors que le médecin lui appose les plaques d’électrochocs. Alors que trois membres de l’équipe américaine sont partis découvrir la base des norvégiens, le silence règne dans la base, et, le loup chassé déambule dans un couloir vide avant d’entrer dans une chambre et de rencontrer son premier candidat que la chose veut copier.

Il n’y a aucun ancrage dans la diégèse sur le mode du monde mental. L’auricularisation interne est substituée par un monologue du héros McReady qui enregistre sa propre voix sur un magnétophone. Cette action suppose qu’il n’est pas le seul à écouter ce qu’il enregistre. Il choisit d'effacer une remarque qu’il fait « personne ne fait plus confiance à personne » … les propos fatigués qu'il tient à la fin du film montre qu'il n’a même plus confiance en lui-même et doute d'être humain.



L’ancrage dans la fosse est écrite par le compositeur Ennio Morricone. Sa musique introduit le film sur le défilement du générique. La création d’ambiance est introduite par la bande musicale. Avant même les premières images du film, la construction de l’émotion à ressentir pour la vision de The Thing est en œuvre. La musique donne le ton de l’histoire et introduit le genre auquel The Thing appartient. La tonalité est angoissante et le rythme est lent. La musique est discrète, répétitive et lancinante avec quelques légers pics sonores (accroissant l’attente d’un intense effet musical qui n’arrive jamais, tout comme la délivrance en conclusion de The Thing). La musique n'évolue pas. Elle crée un sentiment de fatalisme. A aucun moment, elle ne vient relancer un espoir ou un changement qui pourrait indiquer une amélioration. La musique enferme le spectateur dans l’effroi.

La musique qui introduit le film le clôture. Elle insiste sur l’effet d'action reproductible à l'infini (les deux survivants ne sont pas certains que la chose soit détruite ni d'être toujours humains) avant le point de départ et après le point d’arrivée de la narration. Cette utilisation de la musique (au-delà aussi du fait que l’histoire s’est clôturée et qu’elle a délivrée ses clés pessimistes) insistent sur l’aspect d’aggravation du problème (la suspicion envers l’autre de vouloir le transformer en ce qu’il n’est pas).


La musique n’est pas omniprésente. Elle sert à intensifier des espaces choisis par Carpenter. Les moments où la chose est directement concernée et les instants de découverte sont privilégiés : l’arrivée du loup / chose à la base américaine, le départ en hélicoptère vers la base norvégienne, la découverte de la base norvégienne, la découverte de la chose, la découverte du vaisseau spatial. La musique intensifie la découverte de l’irréel et d’incongru. Elle appuie cette étrangeté et développe sa « réalité » dans l’incompréhension qu’éprouve le spectateur face à ce qu’il ne connaît pas.


La musique crée une atmosphère propice au réalisme de la diégèse du film. Elle est en accord avec la narration. Elle sert l’effroi autant que la création de la diégèse et sert les intérêts de l’effet à produire sur le spectateur par le biais de l’aura que la musique possède d’élever les âmes vers des états de tout genre.


Le film ne possède pas d’ancrage dans l’instance d’énonciation. Aucune voix over ne se fait entendre.

Conclusion

Dans The Thing, le verbocentrisme est d'usage. Tous les aspects de la bande sonore servent à créer un univers crédible pour le spectateur où le son et l’image ne dépareillent pas. Le son intéresse le spectateur et sert Carpenter à le mettre en scène dans sa grande parade de l’effroi. Le but artistique du film est de plonger le spectateur dans une torpeur glaciale et dans l’insoutenable attente d’une délivrance afin qu’il frémisse d’effroi et d’espoir à la vision du long-métrage.


*diégèse = univers propre au récit/film