La sélection de Donc Acte !

Donc Acte ! ne suit pas l'actualité cinéma à la loupe. Donc Acte !, qui s'est intitulé Le cinéphobe pendant une courte période, n'a pas pour passe-temps de visionner des pelloches de cinoche. Donc Acte ! ne va pas souvent voir une œuvre en salles. L'envie est rare. Le plaisir est d'autant plus intense lorsque je suis satisfait par une rencontre du 7ème art. Certains films m'inspirent des réflexions ; c'est ce que je souhaite partager. Je ne propose pas de thèses et il m'arrive de gâcher les histoires en racontant la fin. Vu que je ne mets pas ce qui a été fait de l'invention des frères Lumière sur un piédestal et que je suis des fois moqueur, Donc Acte ! peut ne pas plaire.

samedi 30 juillet 2011

Just Go With It / Le Mytho

Nuit du vendredi 29 juillet au samedi 30 Juillet 2011


Just Go With It (2011) est une comédie américaine de 117 min réalisée par Dennis Dugan avec Adam Sandler, Jennifer Aniston, Nicole Kidman, Nick Swardson et ...

Brooklyn Decker




Et c'est tout ce qu'il y a à voir !

mercredi 20 juillet 2011

The Dark Knight Rises Teaser Trailer

Mercredi 20 Juillet 2011
Soir

Le prochain film avec Batman réalisé par Christopher Nolan est attendu comme le messie des juifs. Je n'ai pas été en salles voir Batman Begins (2005) ou The Dark Knight (2008) sous le prétexte de ne pas considérer le superhéros chauve-souris à sa juste valeur (comprendre la valeur que ses fans lui donnent).

J'avais attendu une diffusion télévisée pour apprécier la version Nolan du riche fils à papa qui sort la nuit en costume dans l'espoir d'exorciser le mal que les criminels ont fait à ses parents. J'ai été très déçu. L'intrigue était inintéressante. Je n'ai pas regardé Batman Begins jusqu'à son terme.


Un sympathique ami m'a prêté le DVD de The Dark Knight en soulignant qu'il n'avait pas vu Batman Begins, que cette suite était une bombe et que le Joker interprété par Heath Ledger était excellent. J'ai fait la constatation que l'acteur australien décédé en 2008 avait du talent. Par contre, le discours de The Dark Knight sur la justice est trouble. J'appuie certes l'argument soulignant qu'un justicier masqué doit être remplacé par un procureur ambitieux habité par la foi du juste pour incarner l'ordre public. Il faut tout de même espérer qu'il soit épaulé par un chef de la police qui ne meurt pas en buvant son café et un policier intègre qui ne se laisse pas convaincre par les excuses fallacieuses de son seul ami, à savoir Batman, le chevalier noir, qui va s'attribuer une facette dérangeante de l'héroïsme.

 
Petit aparté : en France, ce plaidoyer devrait inclure les juges d'instruction, les ministres de la justice, de l'intérieur, des finances et du trésor public (subtilité franco-française), le préfet de police de la ville, le chef de la brigade des mœurs et le maire. Qui dit ministres dit gouvernement. Qui dit gouvernement dit chef de l'état. Suit ensuite la presse et les médias. Là où aux États-Unis, il suffit d'un seul homme pour "rectifier le monde" et d'autres pour lui obéir, chez les français, notre superhéros serait directement passé par la case The Dark Knight, à savoir "il vaut mieux savoir courir que guérir" pendant que les autres se seraient bouffés le nez.


Bref, Batman devenu The Dark Knight s'en allait en catimini dans la nuit en s'accusant d'un crime qu'il n'avait pas commis parce que le justicier qu'il était devenu, selon lui, avait acquis trop d'importance. Entre copies, nemesis et réelle suscitation de foi, la question de l'influence se posait.
  • Le Joker était cause à créer chaos et désordre dans la ville de Gotham City car l'ombre trop importante que créait Batman devait être amoindrie.
  • Harvey Dent, le procureur inspiré par l'élan initié par Batman dans l'opus précédent, voulait faire régner l'ordre de jour et de nuit avant de tomber en disgrâce commettant de multiples meurtres suite à la disparition de sa fiancée, la douleur et la force de conviction du joker.
  • Des citoyens modèles se déguisaient en chauve-souris pour faire respecter la justice la nuit.
Mais Nolan devrait apprendre à différencier la muse de l'artiste, l'influence de l'influencé. Dans The Dark Knight, le joker, la mafia et Harvey Dent sont-il responsables de leurs actes ?

Considéré que Batman acceptait de porter la honte sur ses épaules afin de ne pas rendre publique l'information que le chevalier blanc de Gotham City Harvey Dent était devenu un criminel inspiré par le joker, il fallait penser que le Joker méritait son incarcération dans une institution psychiatrique (à celui qui dérange l'ordre et corrompt la place du fou), monsieur Dent méritait une mort honorable pour une première partie de carrière glorieuse et The Dark Knight était un héros en couvrant un meurtrier.

Pour redorer le blason de l'institution judiciaire, Nolan sert la soupe au mensonge d'état et à la mystification du peuple. Ce qui se rapproche d'une idéologie fasciste dissimulant la vérité et assurant l'intégrité du système en couvrant des crimes. Il excuse également une ablation temporaire de la liberté individuelle (très utile à l'intrigue et très légèrement contestée par Lucius Fox). Outre les meurtres, la loi du secret sert à cacher ceci :
  • Les êtres humains sont faillibles. L'erreur est humaine.
  • Ils demandent l'impossible à leurs dirigeants. L'erreur est humaine.
  • Aucun système ni personne n'est parfait. L'erreur est humaine.
Pour se détacher de la foi en un justicier solitaire, l'idéal que Nolan défend est celui de la conservation de l'image de la perfection du système (N'a-t-il été jamais perverti ?) et des personnes hiérarchiquement supérieures et iconographiques (N'ont-elles été jamais corrompues ?), le faut-il, par l'anathème inique d'un humain sacrifié ; donc un bouc émissaire (même s'il peut le supporter parce que c'est Batman).

Pour souligner cet espoir en une immorale justice, l'épisode des ferrys me paraissait contestable au plus haut point et bien arrangeant pour le propos TROUBLE du cinéaste anglais. Il se résume ainsi : "La justice, on en a besoin parce que les gens sont bons et, donc, la méritent". Si la justice se mérite par preuve de bonté (les criminels comme les citoyens), on peut dire au revoir à l'idée universelle de l'application de la loi et la défense des intérêts de tous. Tout le monde a le droit à la justice qu'on la mérite ou pas. Sinon on vit dans une société de privilèges et de privilégiés pour ceux qui font l'effort de prouver leur bonté. Question de justice et de justiciers dans The Dark Knight qui avait vraiment besoin d'une suite car la démonstration choisie pour convaincre du bien-fondé du système juridique était d'une grande maladresse.

Heureusement, The Dark Knight Rises (2012). J'espère que le prix à payer sera celui de la rectification de l'aliénation à la volonté de ne pas salir, de garder propre et pur, au dessus de l'humain, le système, les postes institutionnels et ceux qui ont fait espérer les masses (surtout en ayant commis des meurtres comme Harvey Dent et en punissant un bouc émissaire innocent).


Légende de l'analyse de la bande-annonce :

en noir, la description
en vert, les remarques
en bleu, les détails techniques
en rouge, les panneaux intertitres

Bande-annonce :


Les logos de la Warner Bros. et de Legendary Pictures mode Dark Knight sur des flammes bleues

Une caméra remonte le long de buildings. Tout est bleu et sombre sur ces images numériques
Gros bruit de turbine en fond

Every hero has a journey

Une voix off : "If you make yourself more than just a man ..." (sympa pour l'homme, c'est tout de même lui qui va payer sa place de cinoche pour s'entendre dire qu'il n'est pas assez bien ... voilà un teaser qui bourre le mou de personnes en attente d'état de béatification d'eux-mêmes en s'identifiant à une chauve-souris car être humain, c'est nul ... je croyais en plus que Nolan insistait dans The Dark Knight sur la nécessité d'avoir un représentant de la justice et de l'ordre à dimension humaine et non à dimension héroïque)

De dos, un individu vêtu de loques grimpe une pente rocheuse et (caméra sur grue montante) découvre une contrée glaciale (est-ce une image de Batman Begins ou de The Dark Knight Rises ?)

Every journey has an end

Musique grinçante et angoissante

Voix off toujours : question de dévotion à une idée qui change totalement l'individu (Nolan va-t-il encore nous parler de ses chères et tendres obsessions ?)

Maman, j'ai peur

Un homme tenant un tube fluorescent dans une grotte se lève. Des chauve-souris volent autour de lui. (il s'agit d'images de Batman Begins depuis le début ... je me rappelle de celle-là ; l'homme est Bruce Wayne)

From Christopher Nolan
(ce panneau est accompagné de la voix off : "... then you become something else entirely", Nolan s'adresse-t-il un message à lui-même ?)

 Voix off encore : "une légende, une histoire, une légende"
La toute dernière image de The Dark Knight à l'écran

 Gary Oldman est étendu sur un lit d'hôpital. Il est recroquevillé sur lui-même. Il tient un masque à oxygène non éloigné de sa bouche. Il a du mal à respirer. La justice n'est donc pas au meilleur de sa forme à Gotham City. Ça fait de la peine de voir monsieur Oldman dans un tel état. Il s'engage dans un monologue Nolanien
 La caméra se resserre sur lui en zoomant
 Images de The Dark Knight le montrant casser le projecteur qui permettait de faire appel à Batman dans la nuit

Retour sur la caméra qui monte le long des buildings. Au sommet des immeubles, une lumière blanche éclatante

Gary Oldman sur son lit d'hôpital

Un individu remonte le long d'un puits vers une lumière blanche

Gary Oldman sur son lit d'hôpital

Bruce Wayne fait des pompes (est-il dans une cellule ?) La caméra bouge beaucoup

 Gary Oldman encore et toujours nous explique que Batman doit revenir et qu'il est indispensable même si Bruce Wayne (hors-champ) signale qu'il n'existe peut-être plus. La chauve-souris se fait prier

Une image floue

La musique est devenue très dramatique

L'image floue est devenue nette. Rapide apparition d'un individu à l'air belliqueux affublé d'un masque respiratoire lui couvrant le bas du visage 

Retour sur les buildings. Les contours de la lumière blanche se précise et dessine le signe de Batman. Les buildings commence à s'effondrer (le chevalier noir va devenir le chevalier blanc de la ville ... le second volet de la série n'était qu'un mauvais moment à passer) La lumière devient aveuglante. La musique fait une envolée dramatique

The Dark Knight ... rises
Des choeurs se font entendre

Batman s'échauffe. Un méchant approche

The epic conclusion
...
to the dark knight legend

In theaters and IMAX
SUMMER 2012

Générique des personnes impliquées dans la fabrication du film balancé vite-fait


The Dark Knight est donc de retour parce qu'il le faut bien. La ville de Gotham City est en grand danger. Batman, qui avait trouvé une excuse tordue pour prendre sa retraite, se fait prier sur le lit de mort de son meilleur ami, le seul policier digne de foi, pour reprendre du service et affronter un vilain affublé d'un masque à oxygène. J'ai rarement vu un teaser aussi peu inspirant. Bruce Wayne / Batman doit redorer le blason d'un homme franchement imbu de lui-même en tant que riche et en tant que héros.

EN SALLES EN 2012 !

La sélection du mercredi

Mercredi 20 Juillet 2011

La seconde sélection du mercredi ne s'avère pas favorable à ce que je m'étende sur les films proposés en salle cette semaine. Les bandes-annonces que j'ai vu m'ont donné envie de traiter l'ensemble avec le dos de la cuillère. Donc Acte.

M. Popper (2011) est incarné par Jim Carrey. Il a une femme et des enfants. Il bosse comme un Dieu. Il a un superbe appartement flambant neuf jusqu'au jour où un individu de sa famille (je crois que c'est son père) malheureusement décédé lui envoie des pingouins congelés en lègue. Ces nouveaux compagnons apportent l'imprévu nécessaire à M. Popper pour se détourner, en ces temps de crise financière et économique, de son travail. Mais ses enfants l'adorent quand il transforme son appartement en réfrigérateur grand luxe. Les pingouins aiment aussi. M. Popper leur apprend à danser en rythme. Fin.

Jim Carrey, qu'es-tu devenu ?


Les contes de la nuit (2011) est un film d'animation fait par quelqu'un (habitant à Oslo ou jouant aux osselets) qui a réalisé Kirikou et un autre film commençant par un A que je n'ai pas vu et que je ne verrai jamais. Les personnages et animaux du film sont dessinés en silhouettes. C'est-à-dire que le responsable de l'animation a soit dessiné des contours soit découpé du papier-carton et l'a colorié en noir. Le tout est en 3D. J'ai cru apercevoir un contour de hibou ou de chouette foncer vers le premier plan. Ses yeux étaient verts. Puis quelques confettis volent. Ceci était censé faire œuvre d'explosion visuelle. Fin.

Qu'est devenue la 3D ?



Je ne chroniquerai pas J'aime regarder les filles (2011). J'ai l'impression d'avoir vu le film. Un adolescent veut se faire une bourgeoise. Il se fait taper. Fin.

Que sont devenus les adolescents ?



La bande-annonce du Le Sang des Templiers (2011) constitue le chef d’œuvre de la semaine. Elle commence par une magnifique exposition des prémisses d'une guerre. Des bateaux aux abords d'une plage. Un petit roi joufflu fait son monologue : "attention, va y avoir du grabuge." Puis un gros roi joufflu se mêle à l'affaire. Voilà qui leur manque des individus pour empêcher l'invasion ... mais ensuite je n'ai plus rien compris. Les deux rois se montent l'un contre l'autre. Ou alors, le petit roi joufflu était du côté des navires au début de la b-a. En tout cas, il y a un siège de château. Le petit joufflu en veut au gros joufflu parce qu'il a des templiers dans son armée. Est-ce le cas ? Se battent-ils pour avoir des templiers dans leurs armées ou se battent-ils pour empêcher l'invasion ? J'ai cru à un moment qu'il s'agissait de deux rois qui s'affrontaient en guerre civile alors que l'ennemi commun est sur leur plage. Mais un templier à l'armure ensanglantée et équipée de sa fidèle épée va tout arranger au final, même s'il est dos au mur et encerclé. Fin.

Qu'est devenue la lisibilité d'une bande-annonce ?


Attack the Block (2011) est l'histoire d'extra-terrestres qui envahissent la cité. Nick Frost répond présent à l'appel. Il devrait donc y avoir un humour second degré, dérisoire et auto-dérisoire. Surtout que les producteurs de Shaun of the Dead (2003) sont derrière l'affaire. J'ai cru voir un gros ours ouvrir la bouche et crier. L'extra-terrestre est donc un ours.

Que sont devenus les extra-terrestres ?


The Trip (2010) de Michael Winterbottom (dit la fesse d'hiver) avec Steve Coogan. Ce dernier est un humoriste anglais. Je ne le trouve pas drôle du tout. Dans ce film d'un auteur que j'exècre, Steve Coogan joue le rôle de Steve Coogan. Le voir se pavaner dans la campagne du Royaume-Uni en affichant au travers de lui-même tous les défauts de sa personnalité d'arrogant prétentieux brutalement honnête m'a incité à ne pas finir de regarder la bande-annonce.

Qu'est devenu l'humour british ?


Submarine (2010) a toutes les allures du film de la semaine. Métrage sur des adolescents qui vivent les émois d'adolescents. Le tout est enrobé d'humour décalé, satirique et, donc, brillant. Quelques petits décadrages soulignent l'étrangeté du sentiment accompagnant les changements de l'âge ingrat. Les parents sont originaux et pourrissent la vie de leurs enfants. En fond sonore de la musique à la mode. Le tout est présenté par Ben Stiller. Voilà une perle que Première, Studio et Les Inrockuptibles devraient adorer, et, que les spectateurs devraient installer aux côtés de Little Miss Sunshine et Juno.

Qu'est devenue mon adolescence ?




Je termine avec The Murderer (2011) qui narre les mésaventures d'un homme qui accepte de partir en Corée pour tuer sur contrat un individu inconnu. Il se retrouve pris au piège entre la police locale et ceux qui l'ont engagé. Il est en fuite mais il tient à savoir qui l'a mis dans cette situation bien compliquée. Et bien, mon bonhomme, je te délivre : c'est toi ! Tu n'avais qu'à refuser ce boulot.

Qu'est devenue la morale ?






Moi, basé sur la mauvaise foi et l'envie de ne pas perdre de temps, je ne vais pas aller au cinéma cette semaine.

Festen (Dogme95 No 1)

Mardi 19 Juillet 2011
Nuit

Dogme95 No 1 Festen est un film réalisé par Thomas Vinterberg en 1998. Le métrage inaugurait la volonté du metteur en scène danois de respecter un vœu de chasteté cinématographique correspondant à la charte du dogme95 écrite par Lars von Trier et lui-même à Copenhague le 13 mars 1995 et proclamée au théâtre de l'Odéon à Paris lors d'une rencontre sur le centenaire du cinéma le 20 mars de la même année.

« Vœu de chasteté
Je jure de me soumettre aux règles qui suivent telles qu'édictées et approuvées par Dogme95

1. Le tournage doit être fait sur place. Les accessoires et décors ne doivent pas être amenés (si on a besoin d'un accessoire particulier pour l'histoire, choisir un endroit où cet accessoire est présent).
2. Le son ne doit jamais être réalisé à part des images, et inversement (aucune musique ne doit être utilisée à moins qu'elle ne soit jouée pendant que la scène est filmée).
3. La caméra doit être portée à la main. Tout mouvement, ou non-mouvement possible avec la main est autorisé. (Le film ne doit pas se dérouler là où la caméra se trouve; le tournage doit se faire là où le film se déroule).
4. Le film doit être en couleurs. Un éclairage spécial n'est pas acceptable. (S'il n'y a pas assez de lumière, la scène doit être coupée, ou une simple lampe attachée à la caméra).
5. Tout traitement optique ou filtre est interdit.
6. Le film ne doit pas contenir d'action de façon superficielle. (Les meurtres, les armes, etc. ne doivent pas apparaître).
7. Les détournements temporels et géographiques sont interdits. (C'est-à-dire que le film se déroule ici et maintenant).
8. Les films de genre ne sont pas acceptables.
9. Le format de la pellicule doit être le format académique 35mm.
10. Le réalisateur ne doit pas être crédité.

De plus je jure en tant que réalisateur de m'abstenir de tout goût personnel. Je ne suis plus un artiste. Je jure de m'abstenir de créer une « œuvre », car je vois l'instant comme plus important que la totalité. Mon but suprême est faire sortir la vérité de mes personnages et de mes scènes. Je jure de faire cela par tous les moyens disponibles et au prix de mon bon goût et de toute considération esthétique.
Et ainsi je fais mon Vœu de Chasteté
Copenhague, Lundi 13 mars 1995
Au nom du Dogme95
Lars Von Trier, Thomas Vinterberg »

Récompensé à Cannes du Prix du Jury en 1998, le vœu des deux cinéastes danois de marquer l'ouverture du second centenaire du cinéma était officiellement adoubé. Le long-métrage réalisé dans des conditions techniques proche de l'amateurisme a connu une distribution internationale et jouit encore d'une renommée sans faille. Thomas Vinterberg, qui voulait se garder de créer des "œuvres", a réalisé un chef d’œuvre et est considéré comme étant un artiste.


Le récit du film s'attache à la volonté d'un fils, Christian Klingenfeldt (Ulrich Thomsen), de dévoiler un lourd secret de famille devant le parterre de sa communauté de sang au complet. Aidé en cela par le devoir de mémoire et le respect dû à sa défunte sœur jumelle Linda, Christian fait éclater la vérité sur son père Helge Klingenfeldt (Henning Moritzen). Rejeté et conspué par sa famille festoyant, Christian doit poursuivre sa lutte. Il est soutenu par une poignée de personnes pour l'aider à imposer sa voix face à celle d'un patriarche dominant.

Conformément à la règle 7, Festen se déroule au présent et sur place. Considéré que l'acte qui fonde les motivations de Christian est passé, Vinterberg met l'accent sur la confrontation père-fils et non sur le secret l'unissant à sa sœur jumelle et son paternel. Cet affrontement est traité en substance dans la durée minime du temps d'une fête de famille dans l'hôtel du patriarche qui est aussi la maison d'enfance de Christian. Le récit proche du temps réel s'appuie sur la résistance de Christian à l'opposition violente de ses congénères, sur sa détermination (les faits dénoncés reposent sur sa parole) et la durée qu'il va se montrer capable d'endurer. 

La problématique tourne autour des moyens d'affirmation et d'acceptation de la vérité. Même si l'emphase du spectateur est du côté de Christian, la caméra portée suivant le jeu délicat et en retenue d'Ulrich Thomsen, le regard du cinéaste s'attarde sur les personnages du père, de la mère et du frère défendant leurs intérêts et renvoyant Christian à son attitude relationnelle en famille, et, à la possibilité du mensonge et de la calomnie ; ce à quoi concède Christian après sa première charge en se justifiant par un défaut de mémoire (soutenu par la culpabilité et l'identification à son agresseur passé).

Ainsi Vinterberg place une lettre qui, comme dans une pièce de théâtre, circule entre plusieurs mains "au présent" et qui contient la vérité. Les détournements temporels qui auraient pu donner lieu à l'utilisation de flash-back indiquant la nature du secret et accusant le père avant la fin du film sont exclus. La résolution du récit repose sur la victoire de la vérité. Dans la première scène où Christian se retrouve seul en présence de son ennemi familial, Thomas Vinterberg le montre pris d'une manie compulsive révélatrice. Le cinéaste danois respecte ici les règles 7 et 6 de la charte du Dogme95. Par respect de la règle 6, l'action superficielle n'est pas montrée. Le secret honteux et la faute reprochée font partie de la catégorie des meurtres, des armes, etc. qui ne doivent pas apparaître.


Mais les révélations que Christian fait sont consolidées par un traitement qui refuse la neutralité et souligne le conflit pour imposer les faits face au parti pris. Ses soutiens sont persuadés de la véracité de ses dires. Il ne manque qu'à Christian que la preuve matérielle irréfutable qui discréditerait son père à la connaissance de la famille. Son autre sœur est en possession de la lettre de la sœur jumelle, une autre voix, une voix d'outre-tombe (qui a purifié son corps en se suicidant par noyade dans une baignoire), mais elle se refuse à admettre la vérité qu'elle y a lu. Festen est le spectacle de l'affrontement de voix. Qui de la vérité ou du plus convaincant s'impose ? Là est le sel de ce film que je vous laisse découvrir si vous ne l'avez pas vu.



P.S. : Histoire de taquiner Thomas Vinterberg, la règle 1 du vœu de chasteté ne semblait pas être respectée dès le premier film labellisé Dogme95. La question est de savoir si le jeu flêché et la lettre de la défunte sœur étaient déjà dans les lieux où Festen a été tourné, ou, s'ils font partie d'accessoires du film amenés par l'équipe. Si le second cas est le bon alors la règle est enfreinte. Rappel de la règle 1 : Le tournage doit être fait sur place. Les accessoires et décors ne doivent pas être amenés (si on a besoin d'un accessoire particulier pour l'histoire, choisir un endroit où cet accessoire est présent). Il faut donc croire que le petit mot de la sœur jumelle de Christian était un accessoire présent dans la maison choisie pour le tournage. Thomas Vinterberg a donc préféré cet endroit parce qu'il y avait des flèches et petits animaux dessinés dans une chambre et une lettre cachée dans un lustre.

Elvira Madigan

Mardi 19 Juillet 2011
Soir

Elvira Madigan est le nom de scène de la funambule danoise Hedvig Jensen qui a entretenu à partir de l'été 1888 une liaison secrète avec Sixten Sparre, lieutenant d'un régiment suédois de dragons, marié et père de deux enfants. Partis sur les chemins de traverse vivre leur amour sans contraintes durant l'été 1889 après la désertion de Sparre, ils ont séjourné à Stockholm, à Copenhague et à Svendborg où ils sont restés locataire d'une chambre d'hôtel pendant un mois. Puis, fuyant la mère d'Elvira, à cours de ressources financières, de travail et sans appui familial ni amical, la balade amoureuse se conclua en tragédie. Le lieutenant Sparre et Elvira Madigan préférèrent la mort à la séparation.

Bo Widerberg, metteur en scène affrontant le classicisme et la rigidité formelle du 7ème art suédois dont le préposé de référence est Ingmar Bergman, a été inspiré par ce fait divers scandinave afin d'affirmer la direction stylistique (en terme de montage, de photographie et de cadrage) qu'il disait influencé par la Nouvelle Vague et d'ajouter une dimension sociale aux films. A ce titre, Widerberg alterne caméra portée sur épaule et caméra au sol.

Pour filmer Elvira Madigan, Bo Widerberg a engagé Jorgen Persson pour s'occuper de la direction de la photographie. Indispensable à l'aspect discursif du film et à la vision de Widerberg sur ce fait divers tragique, la mise en image est d'une grande virtuosité. Le travail de l'opérateur de caméra met l'accent sur une présence de la lumière claire et diffuse magnifiant le réel et mettant en évidence l'état d'esprit des personnages. La blondeur de Pia Degermark (Elvira Madigan) est constamment reflétée comme un miroir dans lequel Sparre y perd ses mots et son jugement. Les promesses de la sensualité corporelle avec Elvira semblent irrésistibles. Une femme a rarement été rendue aussi séduisante à l'écran depuis l'époque du glamour hollywoodien. La diffusion de la lumière rend flous certains contrastes dans le décor car elle souligne l'état ensoleillé, illusionné, ensorcelé qui sont ceux des deux amoureux et qui se détachent du concret et matérialiste monde terrestre. La scène à l'imagerie digne d’Épinal où Elvira Madigan baigne dans une lumière divine l'auréolant de beauté éternelle la montre en train de se nourrir d'aliments qu'elle ramasse à même le sol à genoux dans un champ. L'amour qu'Elvira ressent est stigmatisé comme une régression à un état animal.

L'amour fusionnel est critiqué. Les deux amoureux sont une seule et même personne. Ils sont l'autre. Ils ont échangé leurs places. Ils ont échangé leurs cœurs. Ils voient ce que l'autre voit et sentent ce que l'autre ressent. Leurs mots n'ont d'ailleurs plus aucun sens pour eux. Est-ce imaginer l'amour ? Bo Widerberg indique que ce sentiment qui se vit dans la nature, loin de tout carcan social, est avant tout une histoire de déconnexion du réel et d'emprise sur le fantasme. Sparre, l'ignorant lieutenant déserteur, se pose d'ailleurs la question de la définition de l'amour. Son meilleur ami lui oppose la distorsion de la vision personnelle et l'influence négative de la jeune femme.

Elvira Madigan, funambule.
Le lieutenant Sparre se réjouit d'avoir oublié ses devoirs et de ne plus être en possession de ses sens. Il est heureux dans un abandon total de lui-même. Il a délégué tout son être à Elvira qui a fait de même mais aucun n'est plus capable d'assurer ses propres responsabilités. Les deux amoureux inversent tout. Ils imaginent l'amour et l'acceptation totale de l'autre en pratiquant une intimité fusionnelle mais aucun des deux ne pense à rien d'autre. S'occuper de l'autre n'est pas pris en compte. Elvira s'amuse souvent à emprunter une corde à linge afin de reprendre son activité passée : le funambulisme. Elle agit comme si son activité professionnelle était un passe-temps occasionnel amusant et comme si son amour était son vrai travail.

Hedvig Jensen et Sixten Sparre, amoureux.
Désertant ce monde, cette extrême tolérance les singularise et les isole de la société où le lieutenant et Elvira ne peuvent plus se réinsérer. Elvira Madigan met l'accent sur l'opposition au sentiment de solitude. C'est pour combattre cette impression d'isolement de soi en soi-même qu'un tel amour fou naît. Ce sentiment tenace où l'autre est protecteur de soi détruit les devoirs envers soi-même. A moins que l'une des personnes soit plus responsable que l'autre, un couple fondé sur cet abandon de soi est voué à l'échec car il pousse à l'auto-destruction et la destruction.




Le vrai lieutenant Sparre.
La vraie Elvira Madigan.
























Bo Widerberg.

P.S. : Bo Widerberg réalisa une série de longs-métrages qui marquèrent l'histoire du cinéma scandinave et mondial. Un flic sur le toit (Mannen pa taket), adaptation d'un épisode de la série du roman d'un crime de Sjöwall et Walhöö, est le film policier suédois de référence. Adalen '31, Elvira Madigan et Joe Hill sont trois métrages récompensés au festival de Cannes : Elvira Madigan du prix d'interprétation féminine  en 1967, Adalen '31 du Grand Prix en 1969, Joe Hill du Prix spécial du Jury en 1971.

samedi 16 juillet 2011

Making of de A Sens of Purpose d'In Flames

Vendredi 15 Juillet 2011
Soir


Une certaine déception nait à la découverte de l'usage basique d'une caméra au poing faite par un copain pour suivre Björn Gelotte, guitariste du groupe suédois In Flames, présenter paresseusement le studio dont le groupe est propriétaire. Il y a un flipper Pirates des Caraïbes dans un coin du salon où se trouvent aussi une petite cuisine, une table à manger, des chaises type IKEA et un canapé confortable posé devant la télévision. Les membres du groupe préfèrent d'ailleurs la Nintendo Wii aux autres consoles. Un renfoncement dans un couloir est utilisé pour entreposer le matériel d'un de leurs potes. Une tête joufflue apparait à ce moment-là à l'écran précisant qu'il s'agit bien de son coin à lui. Puis un bureau que ni le cinéaste ni le guitariste ne peuvent montrer. Arrive une salle avec une batterie. Je ne saurai pas préciser si le batteur du groupe est nu ou s'il montre ses fesses (ceci constituant LE gag récurrent du making of, et considéré que j'écris ce texte de mémoire, je me mélange les pinceaux). Puis une salle où enregistrer la voix, une pour la guitare, et une pour le mixage.

Petite précision : In Flames est un groupe de death mélodique fondé en 1990 à Göteborg par Jesper Strömblad et deux de ses compatriotes ayant quitté le groupe avant l'an 2000 à la sortie du 5ème album Clayman (qui m'a fait découvrir leur son) dont voici un extrait, Only for the Weak :


Les sonorités de cette œuvre talentueuse mêlait heavy metal traditionnel et death afin de créer une harmonie entre mélodies rapides, riffs bourrins et cris gutturaux. J'ai tout de site adhéré. C'était une révolution. J'étais jeune. J'avais 21 ans. Je ne connaissais que Metallica, Megadeth, Iron Maiden, Guns N' Roses, Black Sabbath, Corrosion of Conformity, Judas Priest, Pantera, Mercyful Fate, King Diamond (ces trois derniers groupes se rapprochaient le plus du style des suédois), Clawfinger, White Zombie, Misfits, Dead Boys, Led Zeppelin, Jimmy Hendrix, George Brassens, Madonna et ACDC. Je n'étais jamais sorti des sentiers battus du son lourd mélodique. J'entrais dans le monde du bruyant, strident, criant et hurlant.

La même année, je découvrais Mötley Crüe, Children of Bodom, Stratovarius, Helloween, Gamma Ray, Cradle of Filth et d'autres que je n'écoute plus. Mais j'ai continué de prêter attention à la carrière d'In Flames dont j'ai agréablement reçu Reroute to Remain (2002), Come Clarity (2006) et ce Sense of Purpose (2008) dont je me propose de critiquer le making of (2007). Il s'agit de la première occasion dont je dispose pour voir dans quel fer ces bonhommes sont forgés. Donc Acte.

Voici un extrait de Come Clarity, Crawl Through Knives :



Les membres du groupe d'In Flames ont la belle vie. Ils sont propriétaires de leur studio. Ils ont vendu 2 millions d'albums dans le monde. Ils font la musique qui leur plait. Et ils passent leur temps à s'amuser au flipper, aux jeux vidéos, à picoler et à se faire des blagues qui ne me font pas rire mais qui les amusent grandement. Jesper Strömblad, guitariste aux problèmes d'alcoolisme qui l'ont fait s'éloigner du collectif à plusieurs reprises, enchaîne les strikes à la Wii et s'énerve à recommencer plusieurs fois la même prise sur sa guitare. Anders Fridén et le bassiste (me semble-t-il, il n'y a pas de présentation formelle) se vantent de leur nullité au jeu Guitar Hero III dans lequel figurent le titre Take This Life d'In Flames. J'évoque aussi la nudité récurrente du batteur (à son instrument de travail, en train de le réparer à quatre pattes, devant un frigo à la porte ouverte, à l'ouverture d'une bouteille de champagne, sur une poutre, dans un ascenseur, dans un couloir, dans une salle d'enregistrement) qui s'avère être d'ailleurs le plus en avance sur son travail.

Un moment d'humour aux dépends de Björn Gelotte intervient lorsque, sur un bateau, ce dernier reconnait une chanson diffusée sur hauts parleurs. Il prononce les paroles du refrain contenant le mot "blue". Il se rend compte après-coup que la bière qu'il boit a une étiquette bleue. Le guitariste rougit et rit de toutes ses dents.

Un fait étrange marque ce making of. Des personnes extérieures au groupe (la situation n'est pas présentée) demande au batteur, nu encore, de s'installer sur une poutre. Ce dernier croasse ou imite un cri de chat étranglé avant de sauter au sol et de s'enfuir à reculons en imitant la marche d'un singe. Il s'agissait des instructions d'un metteur en scène (pas celui du making of). Vu la présence et l'importance qu'a la bière dans cette séquence, j'ai conclu qu'il s'agissait d'un exercice pour les besoins promotionnels d'une marque de breuvage mousseux mais rien ne l'affirme vraiment.

Au petit matin, débarque Anders qui trouve trois personnes (dont deux membres du groupe) nues assis autour d'une table. Ceci constitue une blague parce qu'ils sont nus. Anders sent le coup fourré et demande où la caméra est posée. Et se déplace hors champ tuant ainsi l'amusement de ses camarades dans l’œuf qui ont probablement essayé de lui faire croire à un "casual naked friday",en français "un vendredi à poil au bureau". Le gentleman Fridén (il conserve ses habits durant tout le film) fait remarquer qu'il sait se faire plaisir en montrant la bonne bouteille d'alcool qu'il boira plus tard tout seul.

Ce spectacle dirigé à courte vue et sans inquiétude de la forme est très agréable. Là où beaucoup tente de donner du fond à l'art, aux artistes, à ce qui se filme, à la vie, on assiste au spectacle des individus qui réussissent leur bout de chemin sans soigner autre chose que leur musique. Il n'y a plus de honte.
 
Le making of est bien loin de présenter cette image avenante du groupe.
L'amateurisme guidant, il faut, à décharge, signaler qu'il est difficile d'expliquer dans un enregistrement d'album d'où sort véritablement le "génie créatif". Ce que montre ce making of, c'est que l'inspiration se dessine ailleurs que dans un studio. Mais In Flames a décidé de se montrer tel quel sans souci de polir leur image ou d'intégrer une notion d'explication et de direction ou d'efficacité dans le montage même du documentaire. Ainsi, la moitié d'un épisode (7 minutes) est dédié à l'enregistrement de la basse. Un chevelu joue continuellement les trois mêmes notes sur le même rythme collaborant avec le mixeur de l'album qui ne répond jamais à aucune question et renvoie toujours la balle dans l'autre camp. En somme, Five et In Flames ont décidé de montrer le labeur de l'enregistrement studio ... et quelques méthodes de relaxation. Et rien d'autre.

Voici le fruit du labeur 2007 d'In Flames, The Mirror's Truth, A Sens of Purpose :


vendredi 15 juillet 2011

The Thing version 2011 trailer


Vendredi 15 Juillet 2011
Après-midi

The Thing est un film réalisé en 1982 par John Carpenter pour le studio Universal. Mordu de la première heure de The Thing From Another World (1951) officiellement réalisé par Christian Nyby officieusement par Howard Hawks (ce dernier ayant crédité Nyby pour le récompenser d'avoir sauver le montage de Red River en 1948), John Carpenter, forte tête prise d'altruisme de vouloir partager un traumatisme enfantin avec une autre génération que la sienne, ne s'est pas borné à tourner un simple remake.


John Carpenter songeait à faire un film de groupe d'hommes comme il n'en avait pas été fait depuis longtemps (comme The Dirty Dozen de Robert Aldrich -1967-). Il voulait se rapprocher de la nouvelle originale Who Goes There ? de John W. Campbell Junior dans laquelle la paranoïa causait autant de dommages que le monstre. Big John a alors concocté avec une équipe proche du surmenage constant pendant 2 ans le chef d’œuvre du film d'horreur fantastique avec Kurt Russell. Rob Bottin, créateur des effets spéciaux, vit dans une tour d'ivoire depuis.


Au pôle nord, une équipe de chercheurs américains recueillent un loup après avoir été poursuivi par une paire de norvégiens le chassant depuis un hélicoptère. Étrangeté soulevée, les membres de l'expédition US enquête et découvre, dans le camp d'habitation norvégienne, des cadavres de suicidés ou dû à des morts violentes. Les locaux sont en déflagration et ils y trouvent les restes d'une chose brûlée, informe et indescriptible qu'ils ramènent à leur base. Commence alors l'horreur car la chose est en vie


C'est à partir de cette base, et sous le prétexte d'un remake, que Universal remet au goût du jour un projet titré The Thing. Ce métrage confié au néophyte Matthijs van Heijningen Jr., fils du producteur de cinéma Matthijs van Heijningen, est une préquelle du film de John Carpenter. Il est censé se concentrer sur les événement intervenus dans le camp norvégien avant l'infection américaine.



Retour donc à l'époque où les norvégiens chassaient le loup en hélicoptère et se tranchaient les veines dans le froid, et, à une époque où Kurt Russell était mauvais perdant aux échecs.




 Pour les pèlerins (99,99% de la population mondiale) qui ne sont pas encore au courant de la façon dont je traite la critique de bande-annonce, voilà un superbe exemple de ma méthode descriptive et analytique :

en noir, la description
en vert, les remarques
en bleu, les détails techniques
en rouge, les panneaux intertitres


Un flanc de montagne enneigée. Un gros hélicoptère plus avancé technologiquement que ceux des norvégiens et des américains réunis dans l'original de 1982.

Une voix off : "On a trouvé quelque chose.""Quoi ?" Mary Elizabeth Winstead regarde par la fenêtre de l'hélicoptère. Elle débarque ou alors ils ont trouvé de la neige.

Mary E. Winstead est stupéfaite dans un laboratoire. Elle apprend qu'"ils", jusque là Ulrich Thomsen, ont découvert une structure basique en Antarctique. Un spécimen.

Encore hélicoptère. Encore du voyage. Un pilote barbu. Une station enneigée. Un drapeau norvégien. Tout ce monde a parlé américain jusque là (et, spoiler alert, continuera jusqu'à la fin). Un gentleman aide Mary EW à descendre de l'hélicoptère.

Trois véhicules jaunes à chenille dans la neige. Toujours du voyage. Le nom de Kate Lloyd est introduite par une voix off. MEW à l'écran. MEW est Kate Lloyd, paléontologue. Elle entre dans une crevasse dans la glace. Elle est accompagnée. Elle a le sourire. Elle aime découvrir des choses. Elle est curieuse. Quelqu'un va lui expliquer pourquoi elle a traversé 10 000 miles en avion. C'est bien de l'apprendre une fois sur place. 

Grosse envolée musicale. MEW est stupéfaite. Fondu au noir.

MEW est agenouillé à côté d'un fossile. Elle a les yeux écarquillés. Re-Fondu au noir.

Un des véhicules à chenille traine un cube recouvert d'une bâche où un homme souriant et son chien ont trouvé refuge. Un beau blond barbu a un regard suspicieux. C'est un bloc de glace. La peur ne s'installe toujours pas. Ulrich Thomsen veut prélever un échantillon. Quelqu'un fait un trou dans la glace avec une perceuse. Fondu au noir.

Ulrich Thomsen étend les bras tel le messie et dit à ses amis qu'ils vont tous être immortalisés comme étant ceux qui ont fait cette découverte : laquelle, point d'interrogation mais on s'en doute ... cris de joie, ukulélé, MEW a l'air inquiète, deux potes trinquent à la bière. Fondu au noir.

Vue extérieure de la station polaire. Fondu enchaîné. La glace du cube fond. Un couloir de la station est désert. Fondu au noir.

Un type se retourne vers le même couloir désert. Un chien-loup arrache avec ses dents le grillage de sa cage. Re-fondu au noir.

Une lampe-torche dans un couloir sombre. La lumière est élevée. Un des chercheurs sous la neige regarde sous un bâtiment. Le cadre se resserre. Écran noir.

Gros bruit. Le bonhomme tombe en arrière et est traîné sous le bâtiment par quelque chose d'invisible. MEW regarde sur sa droite. Des hommes dans la nuit polaire. Écran noir.

Des traces au sol. Quelqu'un dit "My God !" (traduction "Mon Dieu !"). Écran noir.

Un jeune homme souligne le fait que quelqu'un ait été attaqué mais Ulrich Thomsen indique que tout le monde est présent et en bonne santé. Pas de mal donc.
Le beau blond barbu regarde sur sa gauche.

MEW fronce les sourcils. Elle tire un rideau de douche. Quelqu'un n'a pas nettoyé après son passage. En voix off, elle raconte que, peut-être, la personne agressée a été miraculeusement soignée par elle-même ou ...

Écran noir.

... quelqu'un n'est pas qui il semble être. Une ombre dans la nuit. Deux hommes avec une lampe-torche plissent les yeux. La nuit fait cet effet. Un truc avec des tentacules rugit. MEW crie "Burn it !". Quelqu'un allume un feu de signalisation et le lance sous une barraque. Feu.

From Universal Pictures

Écran noir.

Boum boum remixé de la musique du générique original 1982 de The Thing

MEW penche la tête sur la droite.

Un cadavre de chose aperçu vite fait sur une table d'autopsie. Une vue au microscope. Des cellules qui mutent.

And the producers of Dawn of the Dead

La troupe est armée. Un visage a l'air fatigué nerveusement. Trois membres du groupe. Écran noir. MEW explique que la créature copie ses proies puis se cache dans les individus. Cette démonstration est très studieuse et scolaire (loin de la paranoïa de la version Carpenter). L'un de ses individus a un visage qui s'étire. Un autre ayant assisté à la scène crie. Fondu au noir.

MEW précise sa pensée. "Nous sommes pas tous humains." Des types énervés avec des lance-flammes et des armes. MEW se penche en avant. Une femme apparaît derrière elle. Bruit louche. Fondu au noir.

MEW est toujours là. Soulagement. Quoiqu'il y ait un bruit gluant derrière elle. Elle se retourne.

This October

Grosse musique martelée. MEW court dans un couloir. Ulrich Thomsen se traine sur les fesses à reculons. Un hélicoptère décolle. "On ne peut laisser cette chose s'échapper !" MEW descend un escalier rapidement. MEW en train de parler. Un hélicoptère dans le ciel. "Si la chose réussit à s'en aller, des millions de personnes peuvent mourir." (seulement quelques millions sur des milliards d'individus ? pourquoi s'inquiéter ? je suis de mauvaise foi^^) Quelqu'un est en crise d'épilepsie sur le sol. D'autres ont l'air médusé. Jet de lance-flammes. Deux types dans un couloir ; l'un d'eux tient une hache.

In a place where there is nothing (et les norvégiens alors ?)

Un véhicule jaune tombe dans une crevasse. Deux hommes crient à l'intérieur. Le beau blond barbu regarde calmement autour de lui dans la crevasse avec une lampe-torche.

They found

MEW glisse du bord de quelque chose. Le beau blond barbu essaie de la rattraper. C'est raté.
Un couloir en feu. MEW sur le pied de guerre. Elle agite une lampe. Un type qui tient un couteau recule. Une bestiole saute. Cri. Un bras bizarre. Ça va très vite. Le jeune homme dos au sol. Une explosion. MEW regarde en l'air. MEW à reculons sur les fesses.

Something - The Thing

MEW respire la terreur. Fumée. Elle veut tourner un coin. Un bout de la chose surgit. MEW glisse.

October 2011


The Thing version 2011, avec Mary Elizabeth Winstead, Kim Bubbs (exit donc le film entre hommes de Big John), John Edgerton, Ulrich Thomsen (les norvégiens deviennent danois), présente une bande-annonce typique de film d'horreur sans goût.

A savoir :
Introduction : On a trouvé quelque chose. Quoi ? Non, je ne vous crois pas.
Déclencheur : Si si c'est vrai. Attention danger.
 Développement : Regarde derrière toi, tu verras bien.
Suite : Vaincre ou mourir.
Fin : Courses, cris et violence.

Le scénario se retrace les yeux fermés. La bande-annonce est de celles qui dévoilent toutes les clés de l'intrigue en mêlant les images de façon insensée pour créer par associations d'idées (images) et suggestions lourdement appuyées qu'il faut avoir peur. Donc, MEW débarque sur la banquise de l'antarctique sans savoir pourquoi. Ils avaient besoin d'une paléontologue US. "Ils", les norvégiens, n'avaient pas songé à en emmener un ou une avec eux. Le fossile tient dans un cube de glace qui, dès qu'il fond, relâche une créature qui s'attaque ouvertement à l'un d'eux pour le copier et se dissimuler dedans. Aucune dissension n'apparaît pourtant dans le groupe. Ils s'arment. Ils doivent empêcher la créature de s'échapper. Quelques confrontations chose vs humains. Mais, de toute façon, toute l'humanité n'est pas en danger. Puis ils font un tour en chasse-neige (ont-ils déjà cramé la station ? ou vont-ils le faire ?) et tombe par hasard sur le vaisseau spatial dans une crevasse (peut-être est-ce ainsi que les scandinaves ont découvert l'extra-terrestre en premier lieu. Mais alors qu'étaient-ils venus faire en Antarctique ? Pas sûr que de voir le film assure une réponse ... on se rappellera que les norvégiens avaient découvert l'ovni en faisant exploser les couches de glace). Rencontre avec la créature qui pense (je suppose). Combat final. MEW survit-elle ? Probablement. En tout cas, pas de loup poursuivi dans la neige par un hélicoptère ne conclura ce The Thing version 2011, fin trop ouverte pour être crédible, mais peut-être qu'un loup s'échappera tout de même.

L'ensemble est bourré d'incohérences. L'ambiance est convenue et  artificielle. Les sourires et expressions faciales de MEW laissent envisager une direction d'acteur inexistante. L'horreur est prévue pour provoquer des frissons faciles (écarquillez les yeux, mettez votre bouche en "o", secouez la tête de gauche à droite, dites "ça fait peur", et, rongez-vous les ongles). La bestiole en premier plan et sur la table d'autopsie, les convulsions d'un homme à terre ou le visage qui se détend ne soutiennent pas la comparaison avec les effets de Rob Bottin et la suggestion des doutes sur l'identité dissimulée de la chose de la version Carpenter. Les effets digitaux font peine à voir. Les écrans et les fondus au noir, soutenus par une musique et des effets de bruitage usés, sont les seuls éléments de terreur présents dans cette bande-annonce.
MEW est connue pour sa piètre qualité de jeu d'actrice. Elle a un joli minois mais hormis la faculté de crier, elle n'arrive jamais à émouvoir son audience. Elle a l'air absente plutôt que d'afficher la peur à l'écran. Elle incarne de surcroît un personnage toujours en décalage qui ne sait pas pourquoi elle fait 10 000 miles et qui, ensuite, après avoir été sceptique, est la première à prévenir le danger.

En 2001, le maître de l'horreur tirait sa révérence sur un film compilation Ghost of Mars. John Carpenter affirmait prendre sa retraite, qu'il aimait être riche, qu'il était capitaliste (alors qu'on le croyait tous anarchiste) et qu'il allait écrire une autobiographie. Mais il a surtout vendu depuis les droits d'adaptation des titres phares de sa filmographie, joué à plein de jeux vidéos et tweeter comme un glandeur. Ainsi on a eu droit au pire car Big John a lâché la bride. Les nommés The Fog et Assault on Precinct 13 (2005) ne sont pas regardables. Escape from New York encore en préproduction semble être programmé pour une seule et unique vision : Breck Eisner, qui a filmé The Crazies depuis un satellite, et Jonathan Mostow, scénariste et réalisateur des sympathiques Breakdown et U-571, ont pris les commandes. Bonne nouvelle : Brett Ratner, Len Wiseman et Gerard Butler ont dégagé du projet. The Thing version 2011 ne semble pas déroger à la règle des remakes douteux.


Cadeau :