La sélection de Donc Acte !

Donc Acte ! ne suit pas l'actualité cinéma à la loupe. Donc Acte !, qui s'est intitulé Le cinéphobe pendant une courte période, n'a pas pour passe-temps de visionner des pelloches de cinoche. Donc Acte ! ne va pas souvent voir une œuvre en salles. L'envie est rare. Le plaisir est d'autant plus intense lorsque je suis satisfait par une rencontre du 7ème art. Certains films m'inspirent des réflexions ; c'est ce que je souhaite partager. Je ne propose pas de thèses et il m'arrive de gâcher les histoires en racontant la fin. Vu que je ne mets pas ce qui a été fait de l'invention des frères Lumière sur un piédestal et que je suis des fois moqueur, Donc Acte ! peut ne pas plaire.

mercredi 2 novembre 2011

Memories of Murder

Mercredi 2 Novembre 2011
Octobre Rouge #29

Memories of Murder, Joon-ho Bong, 2003, Corée du sud.

En Corée du sud, l'enquête sur un violeur et assassin de femmes est sérieusement compromise par l'ingénuosité du criminel plus talentueux que les policiers. Le détective Park d'un village de la région de Gyunggi (Kan-ho Song) chargé de l'investigation est aficionado du délit de sale gueule, des aveux extorqués par la torture et de la culpabilité des boucs-émissaires. Il s'en prend même avec violence à l'enquêteur Seo venu de Séoul pour l'aider ; ce dernier avait adressé la parole à une femme.

Le récit de Memories of Murder se concentre sur l'histoire véridique et irrésolue d'un tueur en série ayant sévi entre 1986 et 1991 ayant commis 10 viols et meurtres de femmes de 13 à 71 ans sans laisser de traces ni son identité derrière lui. Malgré 3000 suspects interrogés, le criminel reste à ce jour impuni. 

La satire est présente dans la première partie du film pour caractériser le travail de police essayant de refourguer un bouc émissaire comme coupable. Le travail sur le lieu du crime, l'interrogation, la reconstitution privée puis publique sont tournées en dérision par Joon-ho Bong (The Host, Mother). Le détective Seo raisonnable a du mal à imposer son point de vue dans l'indifférence générale ; les techniques de brutalité et d'intimidation ayant fonctionné à merveille au préalable, elles sont sans douter les plus efficaces pour la police rurale. Quant à la vérité, elle éclate lorsqu'un nouveau meurtre survient. Une scène d'assassinat dont la teneur dramatique est rare au cinéma (aidé par le climat décrit au préalable).

Le retard pris est sans pitié. Les victimes s'accumulent. Le bouc émissaire n'était au final qu'un simple d'esprit ayant avoué sous l'intimidation amouraché d'une victime dite occasionnelle. Ainsi l'humour s'efface d'un coup net pour faire rentrer les personnages ruraux dans une phase consciente des conséquences propres à une traque sérieuse d'un tueur en série (le spectateur est mis au courant par un travelling sur un cadavre reposant sur le ventre d'une femme aux mains liées dans le dos et devance la prise de conscience des policiers). L'enquête commence enfin.

Memories of Murder propose l'opposition de 2 policiers aux méthodes se contredisant (le raisonnable rationnel et le rustre instinctif) et expose l'inefficacité des techniques de surface de police (pour rassurer l'opinion publique). C'est un trompe-l’œil de croire qu'un criminel se repère à l'air sur son visage. Même l'idiot du village se moque des policiers de campagne. La fatalité de l'impuni du tueur a inspiré le réalisateur coréen Bong à alterner les tons pour tenir en haleine le spectateur et à présenter une scène de fin représentative du trouble qui en résulte : le regret. Même si la dévotion de Seo à faire triompher la justice est sans faille, ce qui l'emporte est un prégnant souvenir d'un irrésolu (d'où la fin et le titre du film).

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