La sélection de Donc Acte !

Donc Acte ! ne suit pas l'actualité cinéma à la loupe. Donc Acte !, qui s'est intitulé Le cinéphobe pendant une courte période, n'a pas pour passe-temps de visionner des pelloches de cinoche. Donc Acte ! ne va pas souvent voir une œuvre en salles. L'envie est rare. Le plaisir est d'autant plus intense lorsque je suis satisfait par une rencontre du 7ème art. Certains films m'inspirent des réflexions ; c'est ce que je souhaite partager. Je ne propose pas de thèses et il m'arrive de gâcher les histoires en racontant la fin. Vu que je ne mets pas ce qui a été fait de l'invention des frères Lumière sur un piédestal et que je suis des fois moqueur, Donc Acte ! peut ne pas plaire.

samedi 3 mars 2012

"C'est la relève du cinéma français"

Une fois n'est pas coutume

A la veille de la cérémonie des Césars 2012, est paru dans la rubrique Culture, Loisirs du Le Parisien du jeudi 23 février 2012 un article intitulé "C'est la relève du cinéma français". Rédigé par Pierre Vavasseur, l'édito et les articles sur les réalisateurs et les dinosaures sont bourrés de citations mystérieuses que je tiens à retranscrire dans ce message.

Ces 3 textes s'inscrivent dans la double-page présentant La Relève : les réalisateurs, les producteurs, les acteurs en vogue, les dinosaures de la profession et une interview de Guillaume Canet pour illustrer le propos de l'ensemble qui tire sur l'ambulance de ceux qui ne font plus de recettes et vogue sur le succès des autres (les nominés et les césarisés). Fallait-il glorifier davantage les nouveaux pousses du cinoche français* qui apportent audace et talent en rappelant que Jean-Jacques Beineix n'a réalisé qu'un seul film (Mortel Transfert, 2001) depuis 1992 et que les 2 derniers Annaud n'ont pas rempli les salles (surtout que Sa Majesté Minor, 2007, est probablement le film le plus audacieux de l'histoire du cinéma) ? Fallait-il interviewer Guillaume Canet pour qu'il énonce des certitudes certaines telles "Il y a forcément un renouvellement de génération" ? Pas sûr, mais c'est pratique courante. Voilà donc la phrase-clé de l'orientation éditoriale de cette double-page thématique décortiquée par mes soins : "Le roi est mort, vive le Roi !"

La rédaction culturelle (et loisirs) du Parisien pourrait s'interroger sur la validité de l'adoubement de la Loi du plus fort, dit la Loi de la jungle, dans les domaines artistiques (et du loisir). En effet, d'autres auteurs ont droit d'existence et de création malgré les résultats commerciaux et artistiques de leurs œuvres. On ne peut ni produire que des succès ni faire que des chefs d’œuvre. Les résultats du box office ne sont pas gage de qualité (The Thing et Les aventures de Jack Burton de Carpenter, La règle du jeu de Renoir ont été des fours commerciaux en salles alors que Les Pirates des Caraïbes ont cartonné) et la qualité n'est pas gage de succès (van Gogh n'a jamais vendu une toile de sa vie et les pelloches de Jean-Luc Godard n'ont jamais rapporté d'argent à ses producteurs). Le principe du fonctionnement au mérite en art, c'est pour les ignares. De jeunes auteurs français méconnus (mal vendus ?) méritent de l'attention : Emmanuel Mouret et Guillaume Brac par exemple. Le CNC est dédié à l'aide à la création pour financer des films qui ne se feraient pas sans cela : c'est un système français de financement copié dans le monde entier (voir la Corée du sud). Certes, une économie mixte est à mon sens préférable (mélangeant libéral et providentiel), mais, en tout cas, ni guerre idéologique ni glorification de la Loi de la jungle ne s'explique pour promouvoir ces putains de césars.

Retour à Pierre Vavasseur (qui est déjà un dinosaure dans ses techniques promotionnelles), il utilise quelques expressions ramassées qui font mouche.
  • Contestable envolée lyrique : "Tout le monde s'accorde sur ce point : l'année cinéma 2011 aura été un grand cru avec de la cuisse et du bouquet, propre à rassembler grand public et partisans d'un cinéma plus exigeant." (*)
  • Poétique : "les jeunes pousses se bousculent [...] : elles cherchent, foncent, inventent, trouvent, prouvent." ("trouvent" rime avec "prouvent")
  • Humoristique : "Vous avez demandé Polisse ? Ne quittez pas !" (Quid de l'individu qui promulgue le rassemblement du grand public et des partisans d'un art plus exigeant)
  • Relents de défaitisme et de pessimisme : "La guerre est déclarée, un film [...] résistant à l'idée trop vite reçue qu'un enfant gravement malade doit mourir." ("DOIT" ???!!!)
  • Contre-sens : "Pierre Schoeller [...] filme un accident vraiment gore, mais sans doute si près du réel, sur une tranche d'autoroute en construction, il a ouvert la porte d'un cinéma culotté, en phase avec la société d'aujourd'hui qui s'est habituée aux brutalités." (Un point avant "il a ouvert" vaut mieux qu'une virgule car le sens de la phrase est contradictoire : "Pierre Schoeller filme un accident vraiment gore, mais sans doute si près du réel [...], il a ouvert la porte d'un cinéma culotté, en phase avec la société d'aujourd'hui qui s'est habituée aux brutalités." ... Comment peut-on être "culotté" et "en phase" ? Comment peut-on faire effet en filmant un accident gore si la société est habituée aux brutalités ? Faut-il croire que le "journaliste" s'est habitué aux brutalités ? Si c'est le cas, faites attention à Pierre Vavasseur !)
  • Oxymore : "Michel Hazanavicius [...] ce flamboyant modeste."
  • Enfonceur de clous dans le cercueil : "On ne peut plus compter sur les grands anciens pour tenir la boutique."
  • Incompréhensible : "Ils avaient la carte, comme on dit d'un visage qui fait autorité, [un visage] qui est tendance, ..." (Veut-il parler de visages tendancieux ? Peut-on l'accuser de délit de sale gueule ?)
  • Encore défaitiste : "... et voilà qu'ils (les grands anciens) n'ont plus d'atouts."

Ma conclusion est simple et lapidaire : à reconsidérer pour la rédaction des pages Culture et Loisirs du Parisien, le verbe et le fond de commerce.


*A noter que les cinéastes en vogue sont Valérie Donzelli, Maïwenn, Pierre Schoeller, Michel Hazanavicius, Pascal Chaumeil, Guillaume Canet et Jacques Audiard, et que les dinosaures sont Gérard Jugnot, Régis Wargnier, Jean-Jacques Beineix et Jean-Jacques Annaud. Après, chacun a son opinion.

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