La sélection de Donc Acte !

Donc Acte ! ne suit pas l'actualité cinéma à la loupe. Donc Acte !, qui s'est intitulé Le cinéphobe pendant une courte période, n'a pas pour passe-temps de visionner des pelloches de cinoche. Donc Acte ! ne va pas souvent voir une œuvre en salles. L'envie est rare. Le plaisir est d'autant plus intense lorsque je suis satisfait par une rencontre du 7ème art. Certains films m'inspirent des réflexions ; c'est ce que je souhaite partager. Je ne propose pas de thèses et il m'arrive de gâcher les histoires en racontant la fin. Vu que je ne mets pas ce qui a été fait de l'invention des frères Lumière sur un piédestal et que je suis des fois moqueur, Donc Acte ! peut ne pas plaire.

lundi 4 juillet 2011

Terribly Happy

Dimanche 3 Juillet 2011
Hors du temps

De son magnifique titre international Terribly Happy, comme le montre l'affiche de gauche, est un polar excellemment ficelé. Et, de son titre original Frygtelig lykkelig, comme le montre l'affiche de droite, retranscrit bien ce que les danois vivent au jour le jour ; c'est-à-dire un bonheur insupportable.

Réalisé en 2008 par Henrik Ruben Genz, Terribly Happy se focalise sur un officier de police, Robert Hansen, interprété sobrement par Jacob Cedergren, qui, après une dépression nerveuse, est muté loin de Copenhague. Il est ainsi séparé de sa femme et de sa fille pour une période indéterminée. Au contact des autochtones d'une petite ville, le policier va se heurter à une hiérarchie inattendue et des coutumes sociales immuables. Seul un petit bout de femme va éveiller l'intérêt de Robert et son morne quotidien. Ingerlise Buhl, interprétée par Lene Maria Christensen, est mariée à une brute. La jalousie de ce dernier aidant, l'intérêt d'Ingerlise d'échapper à un mari violent aidant, et, la recherche du bonheur de Robert Hansen au sein d'une communauté pratiquant une acceptation contraignante et indiscutable aidant, l'intrigue se dessine autour de la mort d'un de ces trois protagonistes.

L'amour se vit mieux à deux.

La réalisation de Genz dont la narration visuelle est descriptive se concentre sur l'essentiel. Pas de lyrisme poétique ou de réflexion métaphysique dans ce film. Le premier degré plonge le spectateur dans la diégèse d'un divertissement à l'univers concret totalement maitrisé. Seul le nécessaire est filmé. Genz conte une sale histoire sans filtres ni détours aux intérêts matérialistes.

Les références à des genres cinématographiques préexistants sont discrètement adaptées à la culture locale et au paysage danois. Les codes du western et du film noir sont habilement imbriqués l'un dans l'autre pour construire un récit captivant aux rouages bien huilés. Les codes du western et du film noir sont utilisés aussi bien dans la thématique que visuellement.

Dans Terribly Happy, les codes du film noir servent à repousser le duel entre l'officier de police et le mari violent grâce à un jeu d'évitements malins. Tout tourne autour des connaissances que peuvent posséder les personnages tentés et/ou  corrompus par le crime. Les questions fusent quant à savoir quand l'un découvrira la vilénie de l'autre ou quand l'un arrêtera de se laisser manipuler par un autre. Les deux hommes cherchent en continuité à trouver le moment soit pour s'affronter soit pour s'éviter tant que la mariée n'est pas dans les bras de l'un d'eux. A noter la scène dérisoire de duel dérivée du western (voir photo ci-dessous).

Duel.

Les plans sur la rue principale, devant le poste de police, rappellent ceux des Main Streets de ville du far west. Cette image renvoie à la mythologie de l'opposition entre l'ordre et la barbarie. La perspective d'un horizon lointain nous promet un duel d'ennemis dans laquelle la police est impliquée (comme au temps des shérifs). L'extrait répétitif à la supérette concernant le châtiment à infliger au garçon voleur à l'étalage et l'itinéraire (d'intégration et amoureux) du policier renvoient au doute quant à savoir qui est le plus barbare de la civilisation ou de la brute (jouée par Kim Bodnia).

En attente d'un duel.

Terribly Happy se termine sur une conclusion habilement tenue en sourdine durant la durée du métrage. La lutte de deux hommes pour l'amour d'une femme est substituée par l'importance des intérêts d'un protagoniste tapis dans l'ombre dont la force est plus contraignante et les intérêts plus collectivistes. Cette vision crue et réaliste sur la vie en communauté défendant la liberté décrit à merveilles relations ambigües entre ordre, justice, amour, barbarie et vie en commun.

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