La sélection de Donc Acte !

Donc Acte ! ne suit pas l'actualité cinéma à la loupe. Donc Acte !, qui s'est intitulé Le cinéphobe pendant une courte période, n'a pas pour passe-temps de visionner des pelloches de cinoche. Donc Acte ! ne va pas souvent voir une œuvre en salles. L'envie est rare. Le plaisir est d'autant plus intense lorsque je suis satisfait par une rencontre du 7ème art. Certains films m'inspirent des réflexions ; c'est ce que je souhaite partager. Je ne propose pas de thèses et il m'arrive de gâcher les histoires en racontant la fin. Vu que je ne mets pas ce qui a été fait de l'invention des frères Lumière sur un piédestal et que je suis des fois moqueur, Donc Acte ! peut ne pas plaire.

samedi 24 septembre 2011

Le gamin au vélo

Samedi 24 Septembre 2011
Veille de nuit

Le gamin au vélo, Jean-Pierre et Luc Dardenne, 2011, Belgique.

L'enfant (2004) était le seul film de Jean-Pierre et Luc Dardenne que j'avais vu avant Le gamin au vélo (2011). Jérémie Rénier incarnait Bruno, 20 ans, qui subvenait aux besoin du couple formé avec Sonia, 18 ans, grâce à des larcins. Bruno vendait même son bébé à des trafiquants afin de gagner de l'argent. Mon histoire personnelle m'a fait considérer l'opposition "responsabilité individuelle versus misérabilisme" de façon réaliste. J'ai cette croyance ancrée en moi qu'une situation sociale difficile n'excuse pas le profit pécuniaire comme composante ou comme totalité expliquant la vente d'un enfant. La seule rentrée d'argent suffit à justifier un débat se situant à un niveau moral plus que matérialiste. L'enfant ne m'a convaincu ni sur son aspect psychologique ni sur sa dimension sociale. Foi de gamin au vélo.

Mais Le gamin au vélo est un long-métrage bouleversant des frères Dardenne justement récompensé du Grand Prix au festival de Cannes 2011. Le récit retranscrit l'histoire d'un jeune garçon tourmenté que le père vient d'abandonner.

La détresse de cet enfant dont son père ne veut plus s'occuper, grâce à la qualité de l'interprétation, de l'écriture et de la mise en scène, m'a renvoyé à ma propre expérience de la meilleure des manières. C'est aussi en cette qualité d'enfant laissé à son sort par le géniteur que j'écris cette critique. Mon appréciation du film ne saurait faire sans.

Jérémie Rénier reprend un rôle de père dans Le gamin au vélo. Les frères Dardenne ont filmé une vision de la composition d'une famille plus proche de celle que j'ai constaté par moi-même. Ce personnage abandonnant son fils a un travail. Sa petite amie enceinte possède un restaurant. Même s'il dit qu'il ne peut pas s'occuper du petit, il ne veut pas le faire ; il n'en a ni l'envie ni n'éprouve de plaisir. Il n'aime pas son fils Cyril.

Un père entre son égoïsme et son devoir de parent. Ne cherchez pas le plaisir de paterner, il n'y en a pas.


Le Piano concerto No5 de Beethoven marque Le gamin au vélo de son ton dramatique



A l'occasion de la sortie DVD, je trouve le courage de revenir sur un article laissé en friches après l'avoir vu en salles au Cinéma des cinéastes un après-midi de mai 2011. Nostalgie quand tu me tiens. Dans ce souvenir, il faut inclure autant la qualité de Le gamin au vélo, que l'agréable séance passée à le visionner dans une ambiance adéquate, que l'émotion que ce film m'a aidé à dégager dont la haine vouée à mon paternel.

Le déni de l'abandon.

Accroché à son vélo, dernier élément qui lui reste de son père, comme moi à un insigne Ferrari de voiture que j'avais échangé avec le mien, dernier signe d'intérêt que lui portait son paternel, le gamin Cyril, incarné par Thomas Doret, n'a qu'une idée en tête : le retrouver. Pour moi, il s'agissait de l'attendre revenir. Mais bon, l'essentiel est retranscrit.

Les étapes au travers lesquelles passent Cyril sont décrites avec justesse. Du déni de l'abandon, en passant par la dépendance affective aveugle envers la première personne qui passe, le rejet de la compassion et de l'amour qu'on lui apporte, le comportement de victime, l'ouverture aux pires influences, le refus des soins offerts et à apporter envers lui-même (une punition qu'il s'inflige), le parcours émotionnel de ce garçon me rappelle le mien.

Un amour difficile à accepter.

Attaché ensuite à la fuite, comme celle de son papa, Cyril rejette tout ce qui peut durer. Le personnage interprété par Cécile de France connaît de plus en plus de difficultés à tenir Cyril. Ce dernier n'a confiance en personne et se rapproche d'un personnage dangereux qui dit souffrir d'une mauvaise réputation. Une belle excuse de profiter de quelqu'un dont Cyril ne souffrira pas dans la séparation et la trahison. Le gamin ne sera nullement contrarié d'avoir été déçu par quelqu'un qu'il savait indigne d'intérêt et de confiance.

Quelqu'un dont il est facile de se détacher.

Un extrait musical de Beethoven conclut chaque chapitre du film. Il apporte une touche dramatique indiquant les moments où Cyril s'enfonce dans son malheur. Pour clore l'étape de la vie de Cyril qui intéressait les cinéastes belges, les frères Dardenne laisse le piano concerto No5 de Beethoven bercer une fin ouverte, propre à un certain inachèvement, celui du travail du père sur son fils, et, celui de la reconnaissance que l'enfant cherche chez son modèle masculin qui a dénié lui donner la chance de l'acquérir. L'avenir de Cyril n'étant pas tout tracé. L'acceptation de nouveaux plaisirs et de nouvelles souffrances, le passage à la prise en charge de soi-même et la recherche d'acceptation et de reconnaissance par quelqu'un d'autre d'aimé l'aimant sont les prochaines étapes de vie de ce gamin très attachant.

Le secret de l'amour est dans un sandwich bien préparé.

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